L’aide à la formation professionnelle étant désormais ciblée sur les PME de moins de 50 salariés, que reste-t-il aux autres ? Les moyennes et grandes entreprises n’ont certes pas attendu les pouvoirs publics pour investir dans les compétences de leurs collaborateurs. Mais à l’heure de l’économie de la connaissance, toutes les aides financières sont les bienvenues. Alternance, subventions exceptionnelles, plans sectoriels, aides régionales, aides de l’Europe… Nous vous proposons une synthèse et un survol des dispositifs existants, dont beaucoup sont traités plus en détails ailleurs sur ce blog.
Sommaire
Les aides à la formation continue : un maquis complexe
Le financement de l’alternance : apprentissage et professionnalisation
La mosaïque des aides à la reconversion
Les programmes spéciaux de l’Etat
Les aides de Pôle emploi : former à l’embauche
Les aides régionales : des politiques territoriales différentes
Les aides européennes : une entrée territoriale
L’amortissement des investissements formation
Les aides individuelles
Les aides à la formation continue : un maquis complexe
L’importance de la formation continue des salariés est un sujet assez consensuel. Les discours publics, qu’ils émanent de l’Etat, des collectivités, des branches professionnelles ou des entreprises elles-mêmes, sont généralement très enthousiastes et volontaristes sur le sujet.
La traduction de cette volonté en aide financière concrète aux entreprises se heurte cependant à plusieurs obstacles :
- Les montants proposés ne sont pas toujours en rapport avec l’ampleur des enjeux ;
- Les conditions posées correspondent souvent à une vision politique un peu abstraite, et ne correspondent pas toujours à la réalité de terrain ;
- La difficulté à trouver l’information et les interlocuteurs, mais aussi la complexité administrative sont dissuasives.
L’interlocuteur le plus simple d’accès, l’Opca, a été remplacé en 2019 par l’Opco, qui réserve désormais l’essentiel de ses financements mutualisés aux entreprises de moins de 50 salariés. Nous nous intéressons ici aux autres canaux de financement.
Le financement de l’alternance : apprentissage et professionnalisation
L’aide la plus facilement mobilisable reste le financement des contrats d’alternance. Il s’agit cependant d’un cas particulier : celui de l’embauche de jeunes (le plus souvent), en vue de les former aux méthodes de l’entreprise – que l’intention soit de les recruter au terme de l’alternance ou non. Il s’agit donc autant de politique de recrutement que de formation.
L’alternance est un mode de formation/recrutement avantageux grâce à la conjonction d’aides financières de différentes origines :
Le financement de la formation elle-même : l’Opco
La formation elle-même est en principe financée par l’Opco. Une part peut cependant rester à la charge de l’entreprise, ce qui risque d’être de plus en plus le cas avec la baisse des taux de prise en charge. Ce montant à acquitter par l’entreprise est souvent plus élevé dans le cas du contrat de professionnalisation.
L’Opco verse parfois en outre des aides pour la formation des maîtres d’apprentissage et des tuteurs de salariés en contrats de professionnalisation.
Le financement de la rémunération : l’État, et parfois Pôle emploi
La rémunération minimale des alternants est encadrée par un barème avantageux : de 27 % à 78 % du Smic suivant l’âge pour un apprenti de moins de 26 ans ; de 55 % à 80 % du Smic pour un salarié en contrat de professionnalisation de la même tranche d’âge. À partir de 26 ans, le Smic s’applique.
Pour payer la rémunération des alternants, les entreprises bénéficient d’une aide exceptionnelle de 6 000 € maximum pour la première année du contrat. Pour y avoir droit, les entreprises de 250 salariés ou plus doivent respecter un quota de 5% de salariés en contrats favorisant l’insertion (alternance ou Cifre), ou tendre vers ce pourcentage. À noter que depuis 2023, les entreprises de moins de 250 salariés, qui avaient accès à des subventions pour les 2e et 3e années du contrat d’alternance pour les formations de niveau bac au maximum, n’y ont plus droit.
À cette aide s’ajoutent des exonérations de charges :
- Les salaires des apprentis et des salariés en contrat de professionnalisation bénéficient de la réduction Fillon dégressive sur les charges patronales jusqu’à 1,6 Smic, comme tous les salaires ;
- Les salaires des apprentis sont en plus exonérés de charges salariales jusqu’à 79% du Smic.
Enfin, les embauches en contrat de professionnalisation donnent dans certains cas droit à des aides de Pôle emploi :
- 2 000 € pour l’embauche d’un demandeur d’emploi de 26 ans ou plus en contrat de professionnalisation ;
- Une aide potentiellement portée à 4 000 € si le demandeur d’emploi a 45 ans ou plus.
Les déductions fiscales
Certaines dépenses peuvent en outre être déduites de la taxe d’apprentissage ou de la contribution supplémentaire à l’apprentissage (CSA).
Le contrat d’apprentissage, en règle générale, apparaît donc comme moins onéreux pour l’entreprise que le contrat de professionnalisation.
À qui s’adresser ?
- À votre Opco, si vous n’avez pas identifié de prestataire, ou si vous disposez d’un CFA ou d’un centre de formation interne ;
- Au CFA ou au prestataire, si vous savez déjà quel profil et quelle formation vous recherchez.
La mosaïque des aides à la reconversion
Certains financements sont réservés à la formation des salariés et demandeurs d’emploi qui choisissent de changer de métier. Le gouvernement a affiché la volonté de simplifier l’ensemble de ces dispositifs. Pour le moment, cependant, le financement des reconversions est assuré via 3 canaux principaux : le projet de transition professionnelle (PTP), TransCo, Pro-A.
En savoir plus sur les financements de la reconversion
Le projet de transition professionnelle : pour les salariés en reconversion
Le PTP a pris la suite du congé individuel de formation (Cif) en 2019. Il permet à un salarié de financer à la fois sa formation et sa rémunération. Il n’y a pas de durée maximale. Le PTP peut être mobilisé dans le cadre d’un projet de mobilité externe, mais aussi en accord avec l’entreprise dans le cadre d’une évolution professionnelle. La rémunération est prise en charge intégralement jusqu’à 2 Smic, partiellement au-delà.
Le PTP mobilise les fonds de la formation professionnelle, c’est-à-dire les 1% de la masse salariale que vous versez chaque mois.
A qui s’adresser ?
- À l’association Transitions Pro de votre région. Les associations Transitions Pro ont pris la suite des Fongecif dans la gestion des financements des reconversions.
TransCo : pour les entreprises, face aux mutations
Le dispositif « Transitions collectives », ou TransCo, s’adresse aux entreprises qui ont besoin de reconvertir une partie de leurs salariés dans de nouveaux métiers. Il mobilise des subventions d’État. Il suppose une démarche volontaire de l’entreprise, qui doit mettre en place un accord de gestion des emplois et des parcours professionnels (dès lors qu’elle emploie plus de 300 salariés). Les métiers auxquels les salariés sont formés doivent figurer sur une liste établie régionalement.
La formation des collaborateurs concernés est prise en charge à 100 % dans les entreprises de moins de 300 salariés, à 75 % entre 300 et 1 000 salariés, à 40 % au-delà de 1 000 salariés.
A qui s’adresser ?
- À l’association Transitions Pro de votre région.
Pro-A : pour les moins qualifiés
La « reconversion ou promotion par l’alternance », ou Pro-A, a été créée par la réforme de 2018. Elle commence cependant juste à se traduire en actes pour les entreprises.
La Pro-A permet de former en alternance des salariés déjà en poste. Les salariés doivent avoir un niveau bac+2 au maximum. La formation doit permettre au salarié de se reconvertir dans un autre métier ou de progresser professionnellement. Elle doit conduire à une certification identifiée par votre branche comme éligible. La formation est prise en charge en tout ou partie par l’Opco, ainsi parfois que la rémunération du stagiaire.
A qui s’adresser ?
Les programmes spéciaux de l’Etat
L’État ne subventionne pas la formation de manière globale : les aides versées interviennent dans le cadre de politiques d’incitation, orientées sur certains thèmes et encadrées par des critères.
Les subventions FNE : partielles et ciblées
Les subventions du FNE-Formation ont été utilisées entre 2020 et 2022 pour soutenir l’activité de formation des entreprises pendant la crise sanitaire, suivant des critères au départ assez lâches, qui se sont précisés avec le temps. Depuis 2023, les fonds sont attribués aux projets de formation qui concourent à 4 « axes prioritaire » : la transition écologique, la transition alimentaire et agricole, la transition numérique, l’accompagnement des JO et de la coupe du monde de Rugby.
Ces subventions ont perdu le caractère exceptionnel qu’elles avaient pendant la crise sanitaire, où les formations pouvaient être prises en charge à 100 %. Désormais, conformément aux règlements européens, la couverture ne peut pas dépasser 50 à 70 %.
A qui s’adresser ?
- À votre Opco.
En savoir plus sur les subventions FNE-Formation
Les Edec : des financements sectoriels très spécifiques
Les « engagements de développement et de l’emploi et des compétences » (Edec) sont des accords signés entre l’État et les branches professionnelles. Il s’agit de plans d’actions conçus pour « anticiper les conséquences des mutations économiques, sociales et démographiques sur les emplois et les compétences et d’adapter les formations et les certifications à ces mutations. » Ces accords portent sur des problématiques sectorielles et parfois territoriales précises.
Dans le cadre de ces accords, il peut être possible aux entreprises de faire financer certaines formations. Plus en amont de la politique de développement des compétences, l’Edec peut permettre que pour un métier donné (nouveau ou en transformation), de nouvelles formations répondant aux nouveaux enjeux soient créées.
Une cinquantaine d’Edec ont déjà été déployés depuis 2016. 7 étaient encore en cours à la rentrée 2023.
Les Edec sont des partenariats dont les branches professionnelles sont des acteurs-clés. Il ne s’agit pas véritablement de guichets ouverts de financements : il faut s’inscrire dans la démarche collective.
A qui s’adresser ?
- Consulter la liste des Edec en cours sur cette page pour vérifier si votre entreprise entre dans le champ de l’un d’eux. Vous pouvez ensuite contacter la branche ou l’Opco en charge de l’accord identifier en question.
Les aides de Pôle emploi : former à l’embauche
Conformément à sa mission, Pôle emploi attribue des aides à la formation dans le contexte de l’embauche de demandeurs d’emploi. Le recours aux aides de Pôle emploi s’inscrit donc dans la politique de recrutement, mais aussi potentiellement dans la démarche d’insertion promue par l’entreprise.
Outre l’aide au recrutement en contrat de professionnalisation, mentionnée plus haut, il existe 3 principales aides, correspondant à des cas de figure différents :
- Pour les contrats longs : la POEI (préparation opérationnelle à l’emploi individuelle). C’est une aide de 3 200 € maximum versée pour financer la formation de salariés embauchés en CDI ou en CDD d’au moins 1 an. Des abondements de Pôle emploi ou de l’Opco peuvent s’y ajouter.
- Pour les contrats courts : l’AFPR (action de formation préalable au recrutement). C’est une aide au financement de la formation de salariés embauchés en CDD de 6 mois à un an.
- Pour les contrats longs, sur des métiers précis : la POEC (préparation opérationnelle à l’emploi individuelle). Il s’agit de programmes mis en place en partenariat entre l’Opco et Pôle emploi, sur des métiers définis. Les formations sont prises en charge intégralement.
Les entreprises peuvent aussi embaucher des stagiaires en immersion, rémunérés par Pôle emploi ou par le RSA. On s’inscrit davantage dans une démarche RSE en faveur de l’insertion.
A qui s’adresser ?
- POEI : Pôle emploi ou votre Opco.
- AFPR : Pôle emploi.
- POEC : votre Opco.
En savoir plus sur les aides de Pôle emploi
Les aides régionales : des politiques territoriales différentes
La formation professionnelle continue fait officiellement partie des compétences des régions. Les conseils régionaux votent chaque année des budgets dédiés à la formation des jeunes et des demandeurs d’emploi. Ces sommes sont souvent allouées dans le cadre de partenariats avec d’autres acteurs, en particulier Pôle emploi et l’État.
En pratique, l’entrée est prioritairement individuelle. Mais l’objectif étant l’insertion, certaines régions ajoutent une entrée « entreprise » : la promesse d’embauche peut faire partie des éléments déclencheurs de la subvention.
C’est le cas notamment en Auvergne-Rhône-Alpes, avec le Pacte Région pour l’emploi.
À qui s’adresser ?
Les aides européennes : une entrée territoriale
L’Union européenne distribue des subventions dans le cadre de différents programmes d’aide. Les principaux sont les Feder (fonds européens de développement régional, un par région) et le FSE+ (fonds social européen, national). Mais il en existe d’autres, comme le FTJ (fonds pour une transition juste), qui concerne 6 régions sur la thématique du changement climatique, ou encore le Feampa, sur la pêche et l’aquaculture. Ces fonds sont régis par des logiques propres, et des programmations pluriannuelles.
A qui s’adresser ?
- Pour s’y retrouver, le site gouvernemental « L’Europe en France » propose une carte interactive, avec une entrée par territoire : en cliquant sur votre département, la liste des aides potentiellement mobilisables s’affiche. Vous serez ensuite, en principe, orienté vers l’interlocuteur pertinent.
L’amortissement des investissements formation
Depuis 2020, une partie des dépenses de formation peut faire l’objet d’un amortissement comptable. C’est le cas des achats de formation externe associés à un investissement matériel ou immatériel. La formation nécessaire à la mise en service d’une immobilisation peut ainsi être amortie, pourvu qu’elle passe par un prestataire extérieur.
Il ne s’agit pas véritablement d’un financement de la formation, mais cette liberté de choix permet au comptable de choisir la formule la plus avantageuse pour l’entreprise.
En savoir plus sur l’amortissement des dépenses de formation liées à un investissement
Les aides individuelles
À côté des aides ciblées sur les entreprises ou mobilisables par celles-ci, des financements sont accessibles aux individus, qu’ils soient salariés ou non. Pour peu que l’intérêt des salariés et de l’entreprise coïncident, ces financements peuvent venir alléger la facture de la formation pour l’organisation. On peut signaler :
- Le compte professionnel de formation (CPF), bien sûr. Entièrement à l’initiative du salarié, ce financement peut être abondé par l’entreprise dans le cadre de projets de formation co-construits.
- Les aides de Pôle emploi : l’aide individuelle à la formation (AIF), ou encore, en cas de licenciement économique, de rupture conventionnelle ou de plan social, l’accompagnement et le financement assurés dans le cadre du contrat de sécurisation professionnelle (CSP, entreprises de moins de 1 000 salariés ou en redressement) ou du congé de reclassement (entreprises de 1 000 salariés et plus).
Il reste donc beaucoup de ressources pour optimiser le financement du plan de formation des entreprises de plus de 50 salariés. Des efforts ont été faits pour en améliorer l’accessibilité, mais ces aides restent administrativement complexes à mobiliser. Le dévouement d’un responsable formation peut ne pas suffire : l’expertise d’un spécialiste de la gestion de la formation peut s’avérer payante !
Crédit photo : Shutterstock / Marc Zimmermann
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