Où iront les 390 millions du FNE-formation pour 2021 ? Jusqu’à quand durera le régime spécial de l’activité partielle ? Va-t-on avoir enfin le « TripAdvisor » de la formation professionnelle ? Alors que se dessine timidement un début de déconfinement et que la perspective d’un « après » ce précise – même si le calendrier reste incertain – le système de formation continue à vivre sous la double influence de la réforme de 2018 et des mesures de crise. Nous revenons sur les principaux chiffres de l’actualité « formation professionnelle » de ce début de printemps.
390 millions d’euros
La formation fait partie des leviers importants du plan de relance initié à l’été 2020. Depuis mars 2020, le principal instrument de la subvention publique en la matière est le Fonds national emploi-formation (FNE-formation). Dans un premier temps, les subventions du FNE ont été ouvertes à toutes les entreprises employant des salariés en activité partielle, avec des critères d’éligibilité minimaux. Cette période « open bar » s’est achevée en 2021, avec la mise en place de nouvelles règles de financement.
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Au total, 390 millions d’euros sont prévus dans le plan de relance pour financer les formations des salariés via le FNE en 2021 – après 280 millions dépensés par le même biais en 2020. Les nouvelles règles prévoient un accès différencié aux financements en fonction de la taille des entreprises. Les PME sont favorisées, avec une prise en charge à 100% des frais pédagogiques pour les entreprises de moins de 300 salariés. Les entreprises plus grandes bénéficient de subventions à hauteur de 70% (ou 80% en APLD). Les entreprises qui n’ont pas de salariés en activité partielle mais qui rencontrent des difficultés financières peuvent accéder au dispositif.
Le FNE version 2021 est donc nettement tourné vers les entreprises de 50 à 300 salariés – les entreprises de moins de 50 salariés voyant déjà la formation de leurs collaborateurs largement prise en charge par les OPCO dans le cadre du plan de développement des compétences (PDC). Sur les dossiers FNE, les OPCO n’interviennent financièrement que pour les frais annexes (transport, hébergement), mais ils assurent l’instruction des demandes.
Au total, il est question de financer 48 000 parcours, d’une durée maximale de 12 mois. En lisant les communiqués des OPCO, il semble que ces parcours ne correspondent pas à des dossiers individuels : les parcours peuvent être collectifs. Et la somme des parcours FNE annoncés par les 8 OPCO qui donnent un chiffre dépasse déjà les 48 000. On peut en déduire que le nombre de salariés effectivement formés sera sensiblement supérieur, et ne sera connu qu’à la fin du programme. Les formations doivent s’inscrire dans 4 parcours-types : reconversion, certification, acquisition de compétences spécifiques au contexte Covid-19, mutations digitales et écologiques.
11 conventions Etat/OPCO
Qui bénéficiera de ces financements ? Alors que la gestion de la première vague du FNE-Formation avait été confiée aux OPCO sans quotas ni critères trop spécifiques, la vague 2021 s’inscrit dans le cadre de conventions conclues entre l’Etat et les OPCO. En conséquence, les fonds sont répartis sectoriellement en fonction des besoins.
L’OPCO2i (industrie) a pris les devants en signant dès le 18 janvier sa convention avec l’Etat. Au passage, il raflait la mise la plus importante, avec 150 millions d’euros et 25 000 parcours, devant se tenir entre le 1er janvier 2021 et le 30 avril 2022. Les entreprises des 32 branches d’OPCO2i seront donc privilégiées par rapport aux autres secteurs.
Le 9 avril 2021, le ministère du Travail annonçait la conclusion des 10 autres conventions. En fonction de la situation économique des branches représentées, les montants sont plus ou moins importants.
Akto recueille 75 millions d’euros. Cet OPCO (ex Opco 11, entreprises à forte intensité de main-d’œuvre) comprend notamment l’hôtellerie-restauration, le transport aérien et la prévention-sécurité, trois secteurs qui ont particulièrement souffert de la crise et qui ont mobilisé l’année dernière les deux tiers des fonds FNE alloués à l’OPCO. Le dispositif « a vocation en 2021 à accompagner les entreprises et leurs salariés vers la reprise d’activité, à travers des parcours de formation plutôt que des formations individuelles ».
Viennent ensuite l’OPCO EP (entreprises de proximité), avec 38,5 millions pour 6 400 parcours, Atlas (finance et conseil), avec 38 millions d’euros pour 8 500 parcours, et l’Opcommerce, avec 37 millions d’euros pour 6 000 parcours. Ce dernier OPCO identifie trois priorités : la transformation vers l’omnicanal, la relation client et la RSE.
L’AFDAS (culture, médias, communication, tourisme) avait conclu fin 2020 une convention pour 2021 prévoyant 20 M€ pour le FNE-Formation « classique », auxquels s’ajoutent 27,5 M€ « dérogatoires » pour les intermittents et les artistes-auteurs.
Ocapiat, dont les branches (agriculture et agro-alimentaire) ont été plutôt moins affectées, recevra 6,5 millions pour 3 000 parcours.
Les 4 autres OPCO (Santé, Uniformation, Constructys, Mobilité) n’ont pas communiqué sur les montants mobilisés, mais une simple soustraction montre qu’ils se partagent les 25 M€ restants. L’OPCO Santé, peu concerné par l’activité partielle, a négocié une convention au bénéfice, essentiellement, de la branche du thermalisme – sans indiquer le montant global.
Activité partielle : 70% jusqu’au 1er juin
Parallèlement, le calendrier de transition vers un régime d’activité partielle moins favorable a de nouveau été aménagé, par deux décrets parus in extremis le 28 avril 2021. Les salariés concernés continueront donc à bénéficier d’une indemnité de 70% de leur salaire brut (84% du net) jusqu’au 1er juin (et non le 1er mai). Les employeurs recevront toujours une compensation de 60% du salaire brut, soit 15% de reste à charge sur le net, avant passage à un régime moins favorable, peut-être en deux temps : 25% de reste à charge en juin, puis 40% à partir de juillet.
Les entreprises du secteur protégé continuent également à bénéficier d’un remboursement intégral de l’indemnité d’activité partielle jusqu’au 1er juin, avant passage à un remboursement à 85%.
>> En savoir plus sur les règles exceptionnelles de l’activité partielle
L’activité partielle conditionne en grande partie l’accès aux subventions du FNE-Formation : d’où son importance pour la formation professionnelle.
106 000 formations évaluées : enfin le « TripAdvisor » de la formation professionnelle ?
C’était l’une des premières annonces relatives à la réforme : en mars 2018, Muriel Pénicaud présentait le futur CPF rénové, accessible directement depuis une application mobile, et permettant d’évaluer en ligne les formations suivies, pour éclairer le choix des utilisateurs. C’était le fameux « TripAdvisor » de la formation professionnelle, en version publique. Plus de deux ans et demi après le vote de la loi, période parsemée d’annonces contradictoires, la fonctionnalité arrive enfin à maturité dans le système d’information mis en place par la Caisse des dépôts et consignation.
>> En savoir plus sur le système d’information du CPF
La révolution se préparait en silence depuis 14 mois, nous a appris la Caisse des dépôts le 22 avril dernier. Pendant tout ce temps, 106 000 évaluations de stagiaires ont été enregistrées. A comparer aux 1,2 millions de formations financées via le CPF en 2020 : une faible part des stagiaires a donné son avis. Faut-il envisager de rendre la procédure obligatoire (si elle ne l’est pas déjà) ?
Les évaluations ont été mises en ligne en avril : la note de 1 à 5 attribuée par les stagiaires à leur formation est donc désormais visible. A ce stade, si vous recherchez une formation sur l’interface moncompteformation.gouv.fr, il vous faudra faire plusieurs essais avant de trouver une formation évaluée : seules 39 000 formations, sur près de 700 000 cataloguées, ont fait l’objet d’une notation, soit 5,6%. 9 100 organismes de formation, soit la moitié de ceux qui sont représentés sur le portail, sont cependant concernés par ces prestations.
Pour l’usager, les notations se présentent ainsi. Une recherche sur une formation en bureautique à Paris vous donnera ces informations :
Certaines formations sont notées, d’autres non. En cliquant sur la formation en haut à gauche, vous accédez à la page dédiée.
L’entrée « évaluations » se détaille comme suit :
La note globale est donc la moyenne de 5 indicateurs. En l’occurrence, cette formation n’est guère représentative : la moyenne des 106 000 évaluations déjà renseignées s’établit à 4,6 sur 5.
La Caisse des Dépôts annonce de nouvelles fonctionnalités pour 2022-2023, avec « d’autres indicateurs sur le retour à l’emploi ou l’adéquation avec les attentes des usagers et des employeurs en termes de qualification », mais aussi des informations sur l’évaluation à froid de la formation et des témoignages de stagiaires.
Le « TripAdvisor » de la formation n’en est donc qu’à ses débuts, mais pour le moment le développement de l’interface CPF suit bien le programme annoncé.
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