Les financements publics et mutualisés de la formation professionnelle en entreprise fluctuent depuis 2020 en fonction de l’évolution des priorités gouvernementales. Qu’il s’agisse des subventions du FNE-formation, des aides à l’alternance ou d’autres dispositifs instaurés pendant la crise sanitaire, les règles changent d’année en année. Qu’en est-il en 2023 ?
Sommaire
Quelles aides financières à la formation dans le contexte post-Covid ?
Le FNE-Formation : quelles règles en 2023 ?
Les structures concernées : toute entité ayant une activité économique
Les actions financées : toute action de formation, bilan de compétences, VAE
Les prestataires de formation : externe ou interne
Les thèmes de formation : 4 axes prioritaires
Les dépenses financées et les taux de prise en charge
Quelles aides à l’apprentissage en 2023 ?
Les autres aides
Quelles aides financières à la formation dans le contexte post-Covid ?
L’histoire récente des aides financières aux entreprises en matière de formation continue des salariés se présente comme une pièce en 3 actes :
- Acte I, avant 2014 : en contrepartie d’une contribution, toutes les entreprises bénéficient de financements pour leur plan de formation. Ainsi que d’aides à l’apprentissage.
- Acte II, 2014-2020 : les 2 réformes de 2014 et 2018 suppriment toute aide aux entreprises de 50 salariés et plus en matière de formation professionnelle. Mais aussi les aides à l’apprentissage pour les entreprises de moins de 250 salariés.
- Acte III, 2020- : suite à la crise sanitaire, les autorités mettent en place des aides financières pour toutes les entreprises, aussi bien sur les formations classiques (FNE-Formation) que pour l’alternance. Les règles en sont ajustées au fil du temps.
En moins de 10 ans, nous sommes donc passés d’un régime d’aides généralisées et durables à un système d’incitations conjoncturelles ciblées et redéfinies chaque année, sans réelle visibilité à moyen terme. Les entreprises et leurs responsables formation doivent s’adapter à cet environnement changeant.
En un sens, cette politique incitative correspond à ce que certains observateurs appelaient de leurs vœux il y a quelques années, en demandant l’instauration d’un crédit d’impôt pour les dépenses de formation. En modulant les dépenses éligibles à ce crédit, il aurait été possible d’orienter les achats en fonction des priorités politiques. C’est un peu ce qui se passe aujourd’hui avec les changements réguliers de ciblage des subventions.
Le FNE-Formation : quelles règles en 2023 ?
Le Fonds national pour l’emploi (FNE) remonte au moins à 2013, dans le cadre de la politique dite « d’appui aux mutations économiques » mise en place par l’Etat. Mais c’est en avril 2020 que l’outil a pris de l’ampleur, avec sa mobilisation dans le cadre du volet « formation » du « quoi qu’il en coûte ». Il s’agissait de permettre aux entreprises de continuer à former leurs salariés pendant le confinement et la pandémie.
Le dispositif a déjà changé plusieurs fois de règles, tout en étant reconduit chaque année. En 2020-2021, il visait essentiellement les entreprises qui avaient mis en place des accords d’activité partielle. En 2021-2022, il a été réorienté vers le financement des reconversions et des entreprises en difficulté. En 2023, il est mobilisé pour d’autres priorités : transition écologique, numérique, alimentaire et agricole, accompagnement des JO.
Autre nouveauté, depuis le 1er juillet 2022 : les subventions FNE ne peuvent plus financer un projet de formation à 100%, ce qui restait possible pour les entreprises de moins de 300 salariés. Nous sommes sortis du régime de l’exception aux règles européennes, et il n’est plus possible de dépasser les 70%.
Voici les principales règles en vigueur en 2023, telles qu’elles sont détaillées dans une instruction de la DGEFP en date du 21 avril 2023 (mise à disposition sur le site de Centre Inffo).
Les structures concernées : toute entité ayant une activité économique
Toutes les organisations engagées dans une activité économique, quel que soit leur statut, peuvent mobiliser le FNE-Formation pour former leurs salariés. Une association qui a une activité économique peut donc en bénéficier, de même qu’un artisan.
Il n’y a donc plus besoin d’avoir des salariés en activité partielle ou de justifier de difficultés économiques pour bénéficier du FNE.
Les actions financées : toute action de formation, bilan de compétences, VAE
Pas de changement pour ce qui est du type d’actions financées (hormis les thématiques). Sont éligibles :
- Les actions de formation de tout type (présentielles, distancielles, en situation de travail). Elles n’ont pas à être certifiantes mais doivent permettre au salarié de développer ses compétences et son employabilité. Les formations sécurité obligatoires sont donc toujours exclues du champ des subventions FNE. Les formations en alternance, également, ne sont pas prises en charge. A noter que les « formations de premier niveau de type bureautique » ne sont pas financées non plus.
- Les bilans de compétences.
- Les actions conduisant à une validation des acquis de l’expérience (VAE).
Les actions doivent être organisées suivant un parcours de formation, conformément à la définition légale de l’action de formation. Mais elles n’ont plus besoin d’être « scénarisées » suivant l’un des 4 parcours thématiques imposés auparavant.
Les actions de formation doivent durer moins de 12 mois, et être prises en charge par le FNE avant le 31 décembre 2023. Elles peuvent donc s’étendre au-delà de cette date.
Les prestataires de formation : externe ou interne
Les formations financées peuvent être délivrées par le service de formation interne si l’entreprise en a un.
Elles peuvent bien sûr être assurées par un organisme de formation externe, à condition qu’il bénéficie de la certification Qualiopi.
Les thèmes de formation : 4 axes prioritaires
Pour être éligibles, les parcours de formation doivent s’inscrire dans 4 grandes priorités de politique économique :
- La transition écologique: transition énergétique des modes de production, adaptation aux « impératifs de la protection de l’environnement », adaptation à la crise de l’énergie, notamment les projets de relocalisation, « en lien notamment avec la souveraineté industrielle ». L’instruction ministérielle renvoie au référentiel de l’Onemev sur les professions vertes et verdissantes et aux « Formacode liés à la transition écologique » listés par les Carif-Oref.
- La transition alimentaire et agricole : cet axe concerne les entreprises agricoles et agro-alimentaires, dans l’accompagnement des transformations liées au changement climatique, à l’évolution des modes de consommation et de la réglementation. Entrent dans ce champ les réorganisations, mécanisation, diversification des modes de production, développement du bio, impact des crises, certifications environnementales, bien-être animal…
- La transition numérique: ciblant en particulier les PME et les ETI, ce champ vise la mise en œuvre des technologies numériques nouvelles, notamment l’intelligence artificielle, et leur diffusion dans les modes de production. Il peut s’agir de l’hybridation de métiers non numériques, ou la montée en compétences des TPE-PME pour leur permettre de bien comprendre ce qu’ils achètent à leurs prestataires informatiques, ou encore de la protection des données et la cybersécurité. Les formations de base à la bureautique, comme déjà précisé, sont exclues.
Pour ces trois catégories de formation, les salariés de 55 ans et plus sont prioritaires, dès lors qu’il s’agit de les maintenir en emploi.
- L’accompagnement des grands événements sportifs: plus spécifiquement, il s’agit de toute formation rendue nécessaire par l’organisation de la coupe du monde de Rugby en 2023 et des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
Les dépenses financées et les taux de prise en charge
Le champ des dépenses éligibles n’est plus celui du FNE « exceptionnel », mais celui défini exclusivement depuis le 1er juillet 2022 par le règlement européen. A savoir :
- Rémunération et frais des formateurs ;
- Rémunération et frais des stagiaires ;
- Équipements pédagogiques ;
- Services de conseil liés à la formation ;
- Frais généraux indirects.
Les taux de pris en charge de ces dépenses par le FNE, en cas d’accord sur le dossier, dépendent de la catégorie de taille à laquelle appartient l’entreprise. Cette catégorisation (qui est aussi celle de l’Insee) ne se fonde pas uniquement sur les effectifs.
- Petites entreprises (moins de 50 salariés, chiffre d’affaires ou total de bilan annuel inférieur à 10 M€) : 70%.
- Moyennes entreprises (ou ETI, entreprise de moins de 250 salariés dont le chiffre d’affaire annuel est inférieur à 50 M€ et le total de bilan annuel à 43 M€) : 60%.
- Grandes entreprises (n’entrant pas dans les deux autres catégories) : 50%
L’employeur doit assumer le complément de financement. Il peut néanmoins recourir aux fonds conventionnels de l’Opco, et bien sûr à ses versements volontaires. Il existe un plafond de 3 M€ par projet de formation.
Quelles aides à l’apprentissage en 2023 ?
Mises en place un peu après les subventions FNE, à l’été 2020, les aides exceptionnelles à l’alternance ont fait littéralement exploser le nombre de contrats d’apprentissage signés. Reconduites jusqu’à la fin de 2022, elles ont changé de conditions d’attribution et de montant au 1er janvier 2023. Selon un communiqué de presse gouvernemental qui doit encore être confirmé par un décret, le niveau des aides sera maintenu jusqu’à 2027, soit la fin du quinquennat.
Les conditions sont détaillées dans cet article. En résumé :
- La formation doit préparer à un diplôme de niveau master au maximum.
- L’aide est égale à 6 000 € au total, quel que soit l’âge du bénéficiaire et le type de contrat (d’apprentissage ou de professionnalisation jeune). Elle est valable pour la première année du contrat uniquement.
- Toutes les entreprises peuvent la demander, mais une condition s’ajoute pour les entreprises de 250 salariés et plus : compter au moins 5% de contrats favorisant l’insertion professionnelle fin 2024, ou au moins 3% mais justifier d’une progression de 10% du nombre d’alternants à la même date.
Les autres aides
Même si la réforme de 2018 a, pour l’essentiel, supprimé les aides formation aux entreprises moyennes et grandes, certains financements demeurent.
- La Pro-A, héritière de la période de professionnalisation, commence petit à petit à se développer. Pour en bénéficier, il faut que votre branche ait conclu un accord sur le sujet, que cet accord ait été étendu, et que la formation que vous visez soit cohérente avec les métiers identifiés dans l’accord. Cela fait beaucoup de conditions. En pratique, la Pro-A est accessible comme composante de l’offre des Opco.
- Les autres dispositifs de reconversion: le Projet de transition professionnelle (PTP) ou Transco peuvent financer la reconversion de vos salariés, dans le cadre d’une mobilité interne ou externe.
- Les aides de Pôle emploi : si vous recrutez des demandeurs d’emploi, leur formation peut être prise en charge par Pôle emploi.
- Le Compte personnel de formation (CPF) peut également contribuer au financement d’actions de formation des salariés conformes à l’intérêt de l’entreprise, mais cela ne peut se faire qu’en co-construction avec les collaborateurs concernés. Ces derniers décident seuls de la mobilisation de leur CPF.
Les aides à l’apprentissage sont, de loin, les subventions les mieux connues et les plus utilisées par les entreprises. Le recours au FNE reste mal connu, les chiffres nous parvenant avec plusieurs années de retard. Les règles changeant chaque année, une veille est nécessaire. Il reste que des fonds sont réellement disponibles pour venir réduire la note du plan de développement des compétences. C’est une partie de l’expertise du responsable formation que de savoir les identifier, avec l’aide des Opco et des prestataires de gestion de la formation externalisée.
Crédit photo : Shutterstock / panuwat phimpha
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