En rang par 12 : entrez dans la classe virtuelle

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La digitalisation et l’essor d’Internet ont donné naissance à des innovations pédagogiques créatives et variées. La classe virtuelle n’est peut-être pas la plus spectaculaire au point de vue purement technologique, mais elle n’en a pas moins la faveur de nombre de responsables formation et de salariés. Quels sont ses avantages et ses inconvénients, d’un point de vue pédagogique ? A quelles conditions donne-t-elle les meilleurs résultats ? Dans cet article, nous nous intéressons à sa définition et à ce que nous savons de l’efficacité de cette modalité. Nous aborderons la classe virtuelle sous l’angle des conseils pratiques dans un second billet.

 

Qu’est-ce qu’une classe virtuelle ?

Dans la galaxie des nouvelles modalités pédagogiques liées au digital – qui vont du module en ligne sans formateur au Mooc en passant par le serious game et le blended learning – la classe virtuelle représente peut-être l’application pédagogique la plus « basique ». Il s’agit en effet de permettre à un enseignant de faire cours devant un effectif réduit, comme en salle de classe, mais avec des participants dispersés géographiquement, par le biais de la visioconférence. En se référant au vocabulaire de l’université, on pourrait dire que la classe virtuelle est à la séance de travaux dirigés (TD) ce que le Mooc est au cours magistral.

Dans le cas du Mooc, en effet, les participants peuvent se compter en milliers, voire en dizaine de milliers. S’il peut exister une forme d’interactivité entre apprenants et enseignant, celle-ci ne saurait être personnalisée. La classe virtuelle, en revanche, repose sur l’interaction entre le formateur et un nombre réduit d’apprenants. Ceux-ci forment un groupe, ils s’identifient les uns les autres ; ils peuvent intervenir et poser des questions, soit oralement, soit par écrit. La classe virtuelle permet également d’échanger des documents, de présenter des vidéos, des graphiques, des images…

L’élément le plus caractéristique de la classe virtuelle reste la dimension « synchrone ». La plupart des innovations pédagogiques liées au digital et à Internet reposent au moins en partie sur un fonctionnement « asynchrone » : l’apprenant se forme en autonomie, à l’heure qu’il souhaite, sans interaction avec un formateur. Les Moocs peuvent être synchrones (en live) ou asynchrone (mis à disposition sur une plateforme). Seule la classe virtuelle est, par nature, une formation en temps réel : son l’efficacité repose sur l’interaction entre un formateur et un groupe restreint d’apprenants.

 

Qui l’utilise ?

Selon le baromètre Cegos 2017, la classe virtuelle serait, avec le présentiel, l’une des modalités de formation les plus prisées des salariés : 97% d’entre eux la plébiscitent. Un peu moins de la moitié des entreprises ont proposé des formations à distance en 2017. Parmi celles-ci, 41% ont utilisé des classes virtuelles. C’est la troisième modalité de formation à distance la plus utilisée, derrière les vidéos (dans 60% des entreprises qui forment à distance) et les modules e-learning (53%), mais bien devant les Mooc, les réseaux sociaux ou le serious game.

 

La classe virtuelle est-elle un cours en présentiel au rabais ?

Le premier avantage de la classe virtuelle qui vient à l’esprit du responsable formation est d’ordre financier et logistique. Quand on a des implantations dispersées géographiquement – et nul besoin d’être une multinationale, ni même une grande entreprise pour cela – l’avantage de ne pas avoir à réunir dans une même salle des collaborateurs venus de trois ou quatre sites différents est évident. On espère faire des économies, on facilite l’harmonisation des agendas, on s’épargne du temps de gestion.

Mais qu’en est-il de l’efficacité de la modalité ? Le jeu en vaut-il la chandelle ? En 2015, deux universitaires français, Georges Ferone et Aurore Lavenka, se sont livrés à une expérience fort instructive : ils ont comparé l’efficacité d’un même cours, donné successivement en présentiel et en classe virtuelle. L’objectif est de répondre à ces deux questions : « la classe virtuelle permet-elle véritablement de réduire l’isolement de l’étudiant, la distance entre le formateur et l’apprenant ? Engendre-t-elle des effets sur la manière d’enseigner et sur les interactions en formation ? » Le cours portait sur la littérature, et s’adressait à des étudiants en IUFM, préparant le concours de professeur des écoles : il s’agit donc de jeunes adultes, en formation initiale, mais à visée professionnelle.

Les réponses apportées sont intéressantes : les auteurs ont observé que la participation des élèves était sensiblement plus élevée à distance, à la fois en nombre d’interventions et en nombre d’élèves qui prennent la parole. En présentiel, quelques élèves (un peu moins de la moitié au total) monopolisent la parole, et on les repère dès le début de la séance. En classe virtuelle, la quasi-totalité des apprenants se sont exprimés, le plus souvent par le biais du clavier. Cette médiation de l’écrit peut expliquer la désinhibition d’élèves qui seraient trop réservés pour prendre la parole en public. Le distanciel permet également une expression simultanée de plusieurs élèves, y compris pendant que le formateur parle. La classe virtuelle réduit enfin le temps de bavardage, et augmente la quantité d’information délivrée (mesurée en nombre de mots).

 

Une efficacité pédagogique renforcée

Par ailleurs, la qualité semble bien au rendez-vous. La classe virtuelle s’est traduite par une plus grande variété d’interactions. La part du contenu centré sur le thème traité et délivré tel quel en mode « descendant » était nettement plus importante qu’en présentiel. Les échanges avec les élèves étaient à la fois plus nombreux et plus équilibrés : en présentiel, l’enseignant sollicite beaucoup plus les apprenants que l’inverse ; en classe virtuelle, l’initiative des questions est partagée à parts égales. En outre, les aspects méthodologiques ont été davantage abordés à distance.

La dimension relationnelle, également, apparaît plus riche en classe virtuelle : plus d’empathie, plus de cordialité, plus d’interpellations directes (le formateur connaît les noms des élèves, ils sont écrits). Seul l’humour pâtit de la distance : le présentiel y est plus propice. Un bémol cependant côté virtuel : les problèmes de connexion font perdre du temps – davantage que le bavardage en présentiel.

La gestion du temps est plus efficace à distance. En classe « réelle », le cours commence 6 minutes après l’heure, qui est perçue comme l’heure à laquelle on doit être présent, et non comme l’heure du début du cours. Le déroulement de celui-ci respecte davantage la structure préétablie : le formateur, en présentiel, gère le temps en supprimant certaines phases du cours ; en distanciel, il raccourcit chacune d’entre elles pour arriver à tenir le programme. Au total, la classe virtuelle demande davantage de travail de structuration en amont, et ce travail se traduit par un surcroît d’efficacité pédagogique.

 

Bien sûr, il ne s’agit que d’une expérience. Et certains aspects plaident également en faveur du présentiel : la cohésion de groupe, la possibilité de se retrouver avant et après, la possibilité pour le formateur de « sentir » le groupe, la plus grande facilité à organiser des travaux communs, notamment autour de supports physiques… Il reste que la classe virtuelle a ses propres vertus, et n’est certainement pas une version « low cost » du cours en présentiel.

Crédit illustration : fotoliavenimo

 

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