Après l’Assemblée nationale, le Sénat a voté à son tour mardi 14 mai le projet de loi sur la sécurisation de l’emploi contenant de nombreuses dispositions en matière de formation professionnelle. Le 21 mai, une concertation entre l’Etat, les régions et les partenaires a débuté pour préparer le grand rendez-vous du début de l’été. En effet, dès demain se tiendra la deuxième conférence sociale qui permettra de dresser le bilan de la première feuille de route sociale et d’engager de nouveaux chantiers pour la période 2013-2014, notamment celui de la réforme de la formation professionnelle. Nous vous proposons une synthèse des 3 points-clés de la loi de sécurisation sur la formation : le compte personnel de formation, l‘articulation des négociations GPEC et formation et la création d’un conseil en évolution professionnelle.
La création du compte personnel de formation
L’article 2 de la loi sur la sécurisation de l’emploi prévoit la création du compte personnel de formation (CPF).
Ce compte est personnel, c’est-à-dire attaché au salarié ou au demandeur d’emploi, indépendamment de sa situation professionnelle. Transférable d’une entreprise à l’autre en cas de changement ou de perte d’emploi, le CPF est alimenté chaque année dans les conditions prévues par le DIF (droit individuel à la formation) mais sans possibilité de monétisation.
Comptabilisé en heures « intégralement transférables », outre les heures de DIF, il peut être abondé notamment par l’Etat ou la région au titre du droit à la formation initiale différée.
La question de son financement devra être clarifiée lors de concertations paritaires d’ici la fin de l’année.
Le 4 mars dernier le président Hollande a affirmé vouloir réorienter une partie des fonds de la formation professionnelle des salariés vers les demandeurs d’emploi. Ils seront donc le public privilégié du CPF avec les jeunes et les actifs sans qualification.
Une question simple se pose alors : sur quels critères un salarié qualifié pourra-t-il faire valoir ses droits à la formation ?
Les prochaines négociations devraient répondre à cette question et fournir un cadre d’application plus précis définissant :
- l’éligibilité des formations,
- les modalités de provisionnement du compte,
- le financement du CPF (concertation avec l’Etat et les régions en plus des partenaires sociaux),
- l’articulation du CPF avec les dispositifs préexistants (cf. notre billet sur La formation dans l’accord sur l’emploi du 11 janvier dernier)
La meilleure articulation des négociations entre GPEC et plan de formation
Selon l’article 9, la négociation sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) devra intégrer les grandes orientations à trois ans de la formation professionnelle dans l’entreprise et les objectifs du plan de formation.
Les objectifs du plan devront donc :
- permettre d’identifier les catégories de salariés et d’emplois prioritaires, ainsi que les compétences et qualifications à acquérir ;
- être définis pour les trois années de validité de l’accord de GPEC.
L’Ani revenait également sur la consultation annuelle du comité d’entreprise sur les orientations du plan de formation. Selon la loi de sécurisation nouvellement votée, elle sera l’occasion de s’assurer que ces orientations sont établies en cohérence avec le dispositif de GPEC mise en place en application de l’article L. 2242-15 du code du travail (cf. notre billet sur La formation dans l’accord sur l’emploi du 11 janvier dernier).
Le projet de plan de formation soumis pour avis au comité d’entreprise devra aussi tenir compte de ces grandes orientations arrêtées le cas échéant par l’accord GPEC.
La création d’un conseil en évolution professionnelle
Selon la loi, tout salarié bénéficie d’un conseil en évolution professionnelle dont l’objectif prioritaire est d’améliorer sa qualification, par exemple en mobilisant son compte personnel de formation. Cet accompagnement, mis en œuvre au niveau local dans le cadre du service public de l’orientation devrait lui permettre :
- d’être informé sur son environnement professionnel et l’évolution des métiers sur le territoire ;
- de mieux connaître ses compétences, de les valoriser et d’identifier les compétences utiles à acquérir pour favoriser son évolution professionnelle ;
- d’identifier les emplois correspondants aux compétences qu’il a acquises ;
- d’être informé des différents dispositifs qu’il peut mobiliser pour réaliser un projet d’évolution professionnelle.
Chaque salarié est informé, notamment par son employeur, de la possibilité de recourir à cet accompagnement, en dehors de l’entreprise. La fonction RH devra donc se former et préparer les réponses à ces futures questions.
Rappelons ici que les structures locales d’accompagnement au sein des bassins d’emploi sont, entre autres, les Fongecif et l’Apec.
Avec la promulgation de cette nouvelle loi, le compte personnel perd donc (enfin !) sa qualification d’Arlésienne mais les règles de son financement ne sont pas encore bien définies. Même si tout doit être clarifié d’ici la fin de l’année, nous pouvons nous interroger dès maintenant : les salariés qualifiés ne risquent-ils pas d’être les grands perdants de cette réforme ?
Sources :
- L’adoption définitive de la loi sur la sécurisation de l’emploi (sur Le portail des politiques publiques de l’emploi et de la formation professionnelle),
- n°142 Projet de loi relatif à la sécurisation de l’emploi – adopté le 14 mai 2013 (sur le site du Sénat)
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- La formation dans l’accord sur l’emploi du 11 janvier dernier (publié le 25 janvier 2013)
2 commentaires
Bonjour Alain
Pourquoi écris tu « outre les heures de DIF » ? Il me semble que le CPF absorbe le DIF, et non qu’il s’y ajoute ?
Amitiés
Bonjour Mathilde,
Je te remercie pour ta lecture assidue du blog Management de la Formation.
Si notre rédaction a pu entretenir une ambiguïté, ton commentaire nous permet de la lever. Tu as tout à fait raison, le CPF absorbe le DIF, comme nous le précisons dans le paragraphe précédent (« le CPF est alimenté chaque année dans les conditions prévues par le DIF »).
Amicalement,
AR