Les grandes entreprises ont des politiques de formation professionnelle actives, les petites se contentent du minimum vital. Cette typologie, plutôt confirmée par les chiffes, est considérée comme allant de soi, et c’est ce constat qui justifie en partie la réforme de 2018 et le fléchage des fonds mutualisés vers les entreprises de moins de 50 salariés. En réalité, toutes les petites entreprises ne sont pas égales devant la formation : dans une infographie publiée en décembre dernier, le Céreq en distingue trois profils différents.
Fin 2017, le Céreq publiait une étude (dont nous rendions compte sur ce blog) démontrant, à partir des données de l’enquête Défis, que seuls un quart des salariés des entreprises de 10 à 19 personnes avaient bénéficié d’une formation en 2015, contre 63% des effectifs des entreprises de plus 500 collaborateurs. Un an plus tard, l’exploitation des mêmes données permet au même organisme d’entrer davantage dans les détails, dans un Bref publié en décembre 2018 (« La formation dans les petites entreprises, reflet de leurs orientations stratégiques ») et résumé dans cette infographie.
Il en ressort que trois catégories de petites entreprises (de 3 à 49 salariés) se dégagent, en fonction des secteurs et des stratégies de développement : les « managériales », les « traditionnelles » et les « entrepreneuriales ». Les premières ont des politiques de formation qui se rapprochent de celles des grandes entreprises ; les deux autres sont faiblement formatrices, mais pour des raisons différentes.
Les « managériales » : comme les grandes
Ce groupe rassemble 37% de l’échantillon. Il s’agit le plus souvent d’entreprises de services positionnées sur des prestations intellectuelles ou techniques, ou encore des professions libérales – comptabilité, conseil juridique, pharmacie… Le plus souvent dirigées par des diplômés du supérieur, elles sont en moyenne un peu plus grandes que les autres, et ont une stratégie de croissance par l’innovation et la compétitivité prix. Elles ont du personnel dédié aux RH et sont bien insérées dans un réseau de partenaires et de prestataires liés au développement des compétences – Opca, organismes de formation, CCI… Les trois quarts d’entre elles ont recruté récemment des salariés, et une formation a suivi ces recrutements, là encore, dans les trois quarts des cas.
Ces entreprises sont formatrices dans 8 cas sur 10, et leurs salariés ont été 44% à recevoir une formation en 2014 – contre 34% en moyenne pour les structures de 3 à 49 salariés. (A noter que l’infographie retranscrit mal ce chiffre : il s’agit bien du pourcentage de salariés formés, et non de la part d’entreprises qui forment leurs salariés). Ce sont des entreprises en bonne santé économique, qui font souvent partie d’un grand groupe : c’est le cas d’un tiers d’entre elles.
Il s’agit donc là d’entreprises qui ont les moyens de financer de la formation et qui, dans le même temps, en ont un besoin impératif.
Les « traditionnelles » : priorité aux formations obligatoires
Ce groupe réunit des entreprises plus anciennes, souvent familiales ou issues d’une reprise. Il s’agit de petites structures, typiquement des restaurants, des garages ou des entreprises du bâtiment. Elles représentent 32% de l’échantillon.
Dans ces entreprises, la préoccupation principale est le maintien de l’activité. Un quart d’entre elles se disent en mauvaise santé ; elles embauchent moins que les autres, et essentiellement pour renouveler les départs. Elles travaillent essentiellement en local. Leurs dirigeants sont peu diplômés, et leurs salariés sont à 45% des ouvriers. Du point de vue RH, elles sont moins souvent organisées que les « managériales » : on ne trouve un collaborateur désigné pour s’occuper des ressources humaines que dans un peu plus de la moitié d’entre elles. Elles sont peu insérées dans les réseaux formation.
Un peu moins du quart des salariés de ces entreprises ont bénéficié d’une formation, et la moitié d’entre elles ont organisé au moins une action de formation. Mais pour l’essentiel, il s’est agi de formations obligatoires, de type Caces ou habilitation d’électricien.
Ces entreprises n’ont pas les moyens de former, et n’en ont pas véritablement besoin : elles ne sont pas dans une stratégie de développement par les compétences.
Les « entrepreneuriales » : priorité aux apprentissages au travail
Les 31% d’entreprises restantes sont également dirigées par des patrons peu diplômés, avec des salariés peu qualifiés, dans des secteurs proches de ceux investis par les « traditionnelles ». En revanche, leurs dirigeants sont, 8 fois sur 10, les créateurs de l’entreprise. 68% d’entre ces entrepreneurs se disent dans une dynamique de développement d’un projet original ou dans l’amélioration d’un service ou d’un produit existants. Ces entreprises sont en bonne santé, souvent en croissance, elles recrutent davantage que les « traditionnelles » et presque autant que les « managériales ». Elles sont implantées sur des marchés plus étendus.
C’est donc un profil d’entreprises très différentes, en recherche de compétences pour se distinguer et se développer, même si elles ont également besoin de formations obligatoires. Elles ont désigné un responsable RH dans 63% des cas, et travaillent avec des partenaires formation. Elles ont davantage recours que les autres à l’apprentissage (34%), et forment plus souvent leurs salariés « sur le tas » (38%). Elles évaluent souvent l’impact de la formation sur leurs résultats. Ce sont des entreprises qui ont souvent du mal à trouver les compétences qu’elles cherchent (un quart des salariés embauché n’a pas les compétences requises), et recourent davantage que les autres à des méthodes de formation informelles sur le lieu de travail.
L’étude précise que ces catégories ne sont pas figées : elles peuvent aussi correspondre à des moments dans la vie d’une même entreprise. La réforme, selon les auteurs, ne devrait pas bénéficier significativement aux petites entreprises managériales, déjà bien outillées, ni aux traditionnelles, qui n’en ont pas les moyens ni la nécessité. Les entreprises de la catégorie des « entrepreneuriales », en revanche, pourront y trouver leur compte : les Opco auront davantage de moyens à leur proposer, les formations en apprentissage seront plus faciles à développer en cohérence avec les besoins des entreprises, et le recours à la formation en situation de travail sera facilité.
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