La transition écologique ne s’improvise pas. Elle implique de nouveaux métiers, de nouvelles manières de produire, de nouvelles compétences et connaissances. Elle passe donc par un effort massif de formation continue. Le Shift Project vient de publier un rapport sur ce sujet, pour essayer de mesurer l’ampleur de la tâche, les ressources à disposition, les initiatives déjà mises en place et le chemin – considérable – qui reste à parcourir.
Sommaire
Le défi de la « double contrainte carbone ». 1
La pyramide des compétences de la transition écologique. 2
Former aux nouvelles compétences et reconvertir les emplois obsolètes. 3
Les 3 freins du système de formation. 4
7 leviers de développement de la formation continue à la transition écologique. 5
Le Shift Project, le think tank spécialisé sur la question des émissions carbone et présidé par Jean-Marc Jancovici, a publié début mars 2025 un rapport sur la formation continue au service de la transition écologique. La Caisse des dépôts, les Acteurs de la Compétences, l’Afpa et 5 autres acteurs du domaine ont participé aux travaux. La transition écologique est un processus complexe, qui doit réunir de nombreuses conditions, nous expliquent les rapporteurs. L’une de ces conditions est la montée en compétences de la population active. Comment réussir à former les 30 millions d’actifs que compte aujourd’hui le pays ? Nous avons retenu quelques points-clés du rapport.
Nous devons réduire nos émissions de gaz à effet de serre pour limiter le réchauffement climatique ; dans le même temps, les ressources en hydrocarbures (80% de l’énergie primaire dans le monde, 50% en France) diminuent, nous contraignant à terme à la sobriété. C’est ce que le Shift Project appelle la « double contrainte carbone ».
Cette double contrainte débouche sur un double défi :
Cette transformation requiert un bouleversement des compétences. Il ne suffit pas de changer la formation initiale des nouveaux arrivants sur le marché du travail : l’ensemble des actifs est concerné.
Trois niveaux de compétences sont nécessaires :
Ces niveaux, précisent les rapporteurs, ne sont pas à comprendre comme un cursus de formation à suivre dans un ordre immuable. Les entreprises et les collaborateurs peuvent très bien être amenés au sujet « transition écologique » par la rencontre avec une contrainte métier, ou par un besoin de développer des compétences transverses en amont d’un projet environnemental donné.
Selon une enquête du Shift Project conduite auprès de 228 entreprises, les formations de type “acculturation/sensibilisation” sont de loin les plus achetées. En revanche, dans l’avenir, un rééquilibrage s’opère au profit des formations métier. Les données sont à prendre avec précaution, l’échantillon étant réduit et composé en grande partie d’entreprises sensibilisées au sujet. Mais la tendance est claire.
Graphique réalisé à partir des données de l’enquête Shift Project
Le système de formation devra donc à la fois développer de nouvelles compétences et assurer la reconversion des personnes exerçant des métiers rendus obsolètes par les contraintes de la transition écologique. En matière de chiffrage, le rapport ne va pas vraiment plus loin que le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE), qui publiait en juillet 2024 un rapport sur la stratégie emploi et compétences à conduire en vue de la transition environnementale. Le document donnait les repères suivants:
Le rapport du Shift Project souligne que ces chiffres ne représentent pas l’intégralité de l’effort de formation à fournir, loin de là. L’ensemble des secteurs est concerné, même si l’évolution des métiers n’est pas toujours aussi marquée. Malheureusement, le rapport ne nous donne pas davantage de chiffres.
Les organismes de formation délivrent déjà des prestations en lien avec la transition écologique, et les entreprises ont déjà commencé à former leurs salariés. Mais l’effort reste insuffisant, pour au moins 3 raisons.
Le Shift Project constate que les organismes de formation se contentent essentiellement de répondre à la demande des entreprises. Lorsque la demande est très structurée, comme dans le nucléaire ou dans le bâtiment, les prestataires s’adaptent efficacement. Mais le plus souvent on reste à un niveau assez superficiel.
On pourrait imaginer que des spécialistes du sujet « transition écologique » construisent de façon plus proactive une offre de formation adaptée aux enjeux et viennent la proposer aux entreprises. Le modèle économique d’une telle démarche n’est cependant pas évident. En l’état, les obligations réglementaires et les financements incitatifs restent les principaux prescripteurs de formation dans ce domaine.
La sensibilisation et l’acculturation domine le marché de la formation aux enjeux écologiques. Cette étape est nécessaire, mais insuffisante. La prise de conscience doit déboucher sur une transformation des métiers et des façons de produire, qui tarde à se traduire en actes.
Cette impréparation fait peser « une menace fondamentale pour notre société : l’impossibilité de réduire les impacts de nos activités sur l’environnement et de nous adapter au changement climatique et à la raréfaction des ressources en temps et en heure. Les risques sociaux sont importants, spécifiquement par l’impréparation des suppressions d’emplois et des conséquences physiques des évènements climatiques extrêmes. »
Beaucoup d’acteurs publics et privés se mobilisent pour accompagner la dimension “formation” de la transition écologique: les Opco, l’Etat, les régions, France Travail… L’ensemble n’est cependant pas toujours très lisible pour les entreprises. Il est intéressant de noter que les organismes de formation sont les acteurs les plus souvent cités comme sources d’information sur le développement des compétences en matière de transition environnementale. Le rôle prescripteur des prestataires de formation est donc réel.
Le rapport s’achève sur l’identification de 7 leviers à utiliser pour accompagner le développement des compétences à hauteur des enjeux de la transition écologique, avec une clé de voûte: une planification à l’échelle nationale et européenne. Les 7 leviers sont les suivants:
Globalement, le rapport n’apporte pas beaucoup d’éléments nouveaux et donne parfois le sentiment que les auteurs ont été un peu débordés par l’abondance des points de vue. Les solutions sont assez institutionnelles. Pour autant, il est probablement difficile d’aboutir à des conclusions très différentes sur ce sujet, et les actions proposées vont incontestablement dans le bon sens. Nous sommes clairement à un moment-charnière, où une masse critique de dirigeants et de collaborateurs semble avoir été sensibilisée, mais où le passage à l’acte concret en est encore à ses balbutiements. La qualité de la sensibilisation déterminera sans doute si les entreprises s’engagent véritablement dans des démarches transformatrices ou se contentent de se mettre en conformité avec la dernière version en date de la réglementation.
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