Les entreprises d’au moins 20 salariés doivent employer au minimum 6% de travailleurs handicapés, ou s’acquitter de pénalités à l’Agefiph. Or, en 2017, plus de 2 entreprises soumises à l’obligation sur 5 ont versé cette pénalité. Dans le même temps, les personnes en situation de handicap sont deux fois plus souvent au chômage que la moyenne de la population active. Comment résoudre cette contradiction ? La réponse passe nécessairement par la formation. Quelques données sur ce marché de l’emploi/formation spécifique, à l’occasion de la sortie du baromètre 2018 du réseau Cap Emploi, que nous croisons avec les chiffres-clés de l’Agefiph sortis en juin 2018.
L’emploi des travailleurs handicapés évolue plutôt dans le bon sens : en 2017, selon l’Agefiph, les entreprises de 20 salariés et plus employaient en moyenne 3,8% de personnes handicapées, soit 0,2% de plus qu’en 2014. Seule une entreprise sur 5 n’avait aucun collaborateur handicapé.
On reste cependant loin de l’objectif légal de 6%. L’offre de travail ne manque pourtant pas : il y avait fin 2017 plus de 513 000 demandeurs d’emploi handicapés, soit un taux de chômage d’environ 19%, contre 9% pour l’ensemble de la population. Les chômeurs handicapés restent en outre plus longtemps sans emploi (804 jours d’ancienneté contre 602).
Pour faire le pont entre l’offre et la demande d’emploi pour cette population, un effort de formation professionnelle est donc nécessaire, ainsi qu’une meilleure information des entreprises. C’est dans cet objectif que la loi Avenir Professionnel a prévu une majoration de l’alimentation du compte personnel de formation (CPF) pour les travailleurs handicapés. Un décret du 7 juin 2019 vient de préciser cette majoration : les salariés concernés par l’obligation d’emploi bénéficieront donc de 800€ par an, contre 500€ pour les autres salariés, avec un plafond de 8 000€ au lieu de 5 000€. Ce surcroît de droits CPF vient entériner le fait que la formation des personnes handicapées coûte souvent plus cher, et peut s’étaler sur plus longtemps afin d’adapter les cursus, en fonction des matières et des handicaps.
Faire le lien entre demandeurs d’emploi et travailleurs handicapés d’une part, employeurs d’autre part est le rôle assumé par le réseau des 98 Cap Emploi. Le Conseil national handicap et emploi des organismes de placement spécialisés (Cheops), qui rassemble l’ensemble de ces structures, a publié le 23 mai 2019 son baromètre de l’activité 2018 des Cap Emploi. Il en ressort une importante mobilisation du levier formation, puisque, à l’initiative, des Cap Emploi, en 2018 :
Soit au total 32 852 formations mises en œuvre à l’initiative du réseau. Le rôle des Cap Emploi, dans ce contexte, consiste à aider le demandeur d’emploi à construire son projet de formation et à trouver des financements. Dans près de 1500 cas, le compte personnel de formation (CPF) a notamment été mobilisé.
Les Cap Emploi ont également prescrit 13 769 périodes de mise en situation en milieu professionnel (PMSMP). Il s’agit d’une période d’une durée maximale d’un mois, au cours de laquelle le bénéficiaire (demandeur d’emploi ou salarié d’une autre organisation) se confronte dans l’entreprise d’accueil à un métier ou à un secteur professionnel. Pour l’entreprise qui cherche à recruter une personne en situation de handicap, c’est une voie possible : 20% des bénéficiaires de PMSMP Cap emploi ont été recrutés à l’issue de la période. Les contrats en alternance (apprentissage et professionnalisation) sont également mobilisés, dans des formations adaptées. Près de 4 000 contrats en alternance ont été mis en place en 2018 dans le cadre de la mission d’insertion des Cap Emploi.
Les Cap emploi ont pour double mission :
Le réseau Cap Emploi est en quelques sortes le Pôle Emploi dédié aux travailleurs reconnus handicapés. Il a accompagné près de 180 000 personnes handicapées et 150 000 employeurs en 2018, avec près de 85 000 placements à la clé.
Le réseau Cap Emploi n’est pas le seul à intervenir sur la thématique de la formation des travailleurs en situation de handicap. Pôle Emploi accueille et oriente également des personnes handicapées. Celles-ci peuvent également se tourner vers le réseau des Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), qui organisent des formations spécifiques sous forme de stages de pré-orientation ou de stages de rééducation professionnelle.
L’organisme de référence en matière de financement et de formation reste l’Agefiph, qui s’occupe notamment de tenir à jour la liste des organismes de formation éligibles à ses financements. L’Agefiph a ainsi financé en 2017 près de 10 000 formations dans les entreprises, plus de 50 000 formations et préparations à l’emploi de personnes handicapées, près de 30 000 actions de maintien dans l’emploi.
Le financement des formations en alternance fait également partie des priorités de l’Agefiph, qui en a financé près de 5 000 en 2017 – apprentissage et professionnalisation, dans des proportions à peu près équivalentes.
Depuis la loi du 10 juillet 1987, les entreprises d’au moins 20 salariés doivent employer des travailleurs handicapés à hauteur d’au moins 6% de leur effectif – un seuil qui correspond à peu près à la proportion de personnes en situation de handicap dans la population en âge de travailler (6,6% des 15-64 ans en 2017, selon l’Agefiph).
Les personnes susceptibles de bénéficier de cette obligation d’emploi sont essentiellement celles qui justifient de la reconnaissance de la qualité de travailleurs handicapé (RQTH) ou les bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), mais aussi les bénéficiaires de rentes d’invalidité ou consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle. Il est possible de remplir partiellement son obligation en ayant recours à des sous-traitants du secteur protégé ou adapté.
La contribution due à l’Agefiph en cas de non-respect de l’obligation d’emploi s’élève, suivant la taille de l’entreprise, à 400 à 600 fois le Smic horaire (soit environ 4000 à 6000€) par salarié handicapé manquant chaque année par rapport aux 6%. En l’absence de toute action en faveur de l’emploi des handicapés pendant 3 ans, on passe à 1 500 fois le Smic horaire, soit plus de 15 000€ par salarié manquant. Il s’agit donc d’une pénalité significative et très incitative.
La loi « Avenir professionnel » du 5 septembre 20189 a encore renforcé les obligations des employeurs. Ainsi, à partir de 2024, le taux de 6% pourra évoluer à la hausse, et sera révisé tous les 5 ans. Les entreprises de moins de 20 salariés doivent désormais déclarer également leur effectif de personnes handicapées, même si elles ne sont toujours pas soumises à l’obligation des 6%. Ce secteur de l’emploi devrait donc être mieux connu statistiquement dans les années qui viennent. Quoi qu’il en soit, la question de l’adaptation au poste, de l’emploi et de la formation des personnes handicapées reste un enjeu majeur, à la fois RH et financier, pour l’entreprise.
>> En savoir plus sur les enjeux RH du handicap en entreprise : Bernard Fricou : « recruter et former des travailleurs en situation de handicap transforme le regard et le management »
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