Quelles seront les compétences demandées par les entreprises en 2030 ? La question intéresse aussi bien les DRH, pour l’élaboration leur stratégie de formation à long terme, que les particuliers désireux de se projeter dans leur avenir professionnel. Le Cedefop propose un regard macroéconomique sur le sujet, à l’échelle européenne, en partant d’hypothèses de croissance et de chômage définies. Prenons un peu de hauteur avec ce rapport Skills Forecast 2018.
La question de l’évolution à moyen et long terme des métiers et des compétences fait couler beaucoup d’encre. Il y a un peu moins d’un an, nous consacrions un article de ce blog à deux autres approches du sujet : celle du Conseil d’orientation de l’emploi (COE), qui évaluait l’impact de l’automatisation et de la numérisation sur l’évolution des métiers, et celle de l’Apec, qui réfléchissait sur les déterminants de la transformation des emplois cadre.
Le Cedefop (Centre européen pour le développement de la formation professionnelle) adopte un angle statistique différent. Partant d’hypothèses économiques précises en matière de croissance, de démographie et d’évolution du marché de l’emploi par secteurs, le rapport Skills Forecast 2018 : trends and challenges 2030 compare l’évolution à 12 ans de la demande de compétences à l’évolution de l’offre.
D’un point de vue global, par rapport à la moyenne européenne, la France se caractérise par une croissance plus importante de la population en emploi : +6,1% contre +1% pour l’Union européenne (et -0,5% en Allemagne). A l’échelle du continent, les auteurs constatent un accroissement de la proportion d’emplois très qualifiés (passant de 39% à 43% de l’emploi total), une légère progression des emplois peu qualifiés (de 9 à 10%), et un recul des emplois moyennement qualifiés (de 52% à 46%).
Ces chiffres confirment en partie les analyses de beaucoup d’économistes, qui annoncent une bipolarisation de l’emploi dans les années à venir. A l’échelle européenne, l’augmentation des emplois peu qualifiés paraît cependant peu prononcée. C’est qu’en réalité, ces moyennes dissimulent d’importantes disparités entre les différents pays. En France, les 20% d’emplois les moins bien payés devraient progresser, en nombre, autant que les 20% les mieux payés. Dans le même temps, les emplois du 4e quintile (les 20% situés juste au-dessus des 20% les moins bien payés) vont reculer légèrement.
Si certains pays, notamment en Europe du Nord et de l’Est, s’orientent vers une hausse générale du niveau des emplois, les grands pays comme la France et l’Allemagne tirent donc la moyenne européenne vers la bipolarisation.
Le rapport entre également dans les détails des types de compétences mobilisées par les emplois de 2030. Les auteurs ont évalué l’évolution positive ou négative d’une trentaine de savoirs, savoir-faire et types de connaissances.
Premier constat : même si les emplois peu qualifiés vont prendre de l’importance, il ne s’agira pas ou peu d’emplois requérant davantage d’aptitudes physiques qu’aujourd’hui. La force et l’habileté manuelle seront moins demandées en 2030 qu’aujourd’hui. Et ce constat reste vrai même si on isole les 20% d’emplois les moins bien payés. L’aptitude à se servir de machines sera également nettement moins demandée, de même que les tâches routinières, répétitives et standardisées.
Tous les autres types de tâches connaîtront un accroissement de la demande. Les compétences dont la progression sera la plus importante sont les connaissances en matière commerciale (business literacy) et les connaissances de base en technologies de l’information et de la communication. Les aptitudes sociales viennent juste après, avec la capacité de persuasion et le sens du service. Du côté des soft skills, l’autonomie, la créativité et la capacité à chercher des solutions suivent de près.
Pour ce qui est des hard skills, on remarque que la comptabilité et la culture générale (humanities) devancent les connaissances plus techniques et spécialisées. Les compétences analytiques seront néanmoins davantage demandées.
Le rapport du Cedefop nous permet ainsi d’entrer un peu dans les détails de la révolution des compétences qui s’annonce, en apportant d’importantes nuances et précisions par rapport aux grandes évolutions souvent annoncées :
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