La ministre déléguée chargée de l’Enseignement et de la Formation professionnels, Carole Grandjean, a répondu aux questions de Management de la formation sur le présent et l’avenir du système de formation professionnelle. Avenir du CPF, transitions professionnelles, Qualiopi, réforme de la VAE, mais aussi rénovation du contrat de professionnalisation avec la VAE inversée… Tous les sujets du moment sont abordés, et commencent à dessiner les contours des changements à venir, dans la continuité de la réforme de 2018.
La loi de 2018 est assurément un succès. Elle a été le point de départ d’un élan exceptionnel donné à la formation professionnelle. Elle s’inscrit bien sûr dans une histoire, qui a progressivement vu ces sujets être mieux compris et investis en France, avec plusieurs plans successifs dans les années 2010 pour la formation des demandeurs d’emploi. Ou l’apparition de la notion de qualité en 2014. Mais une nouvelle ère s’est ouverte en 2018, que nous travaillons encore à conforter.
Les effets concrets sont complètement tangibles. L’essor de l’apprentissage contribue à amener le taux de chômage des jeunes à un niveau historiquement bas et à une transformation en profondeur de tout le système de formation initiale, pour aider à la réussite de tous les profils. La croissance a été très soutenue dans l’enseignement supérieur, mais elle concerne aussi les premiers niveaux de qualification. La mise en place du compte personnel de formation est une autre immense nouveauté, dont se sont massivement emparés les ouvriers et les employés, qui, habituellement, bénéficient beaucoup moins de formation continue.
Il faut prolonger ce mouvement. La focalisation des financements des OPCO vers les entreprises de moins de cinquante salariés à des mérites importants pour l’accès des salariés des petites entreprises à la formation, mais beaucoup reste à faire et à imaginer. D’autant que les innovations pédagogiques foisonnent et nous bousculent : intelligence artificielle, réalité virtuelle, enseignement à distance… de nouvelles pratiques se déploient et nous questionnent. Mon cap est clair : c’est celui de la qualité des formations et de leur utilité pour atteindre le plein emploi.
Les partenaires sociaux l’ont porté dans une démarche interprofessionnelle signée en octobre 2021. Il s’agit de consolider le déploiement et l’appropriation de la loi de 2018. Je souscris très volontiers à cette optique pleine de bon sens. Comme toutes les politiques publiques, l’essor de la formation professionnelle a besoin de continuité dans le temps. Nous avons simplement à tirer les leçons de l’expérience des dernières années pour faire progressivement mieux.
Par exemple sur le sujet des transitions professionnelles. Plusieurs dispositifs existent, mais ils sont mal connus, parfois trop complexes, en tout cas insuffisants. Alors que les besoins et les désirs de reconversion n’ont jamais été aussi intenses.
Je peux aussi parler de la qualité. La certification Qualiopi est maintenant en place depuis 2022. Nous avons observé que le processus d’audit connaissait quelques failles. Elles ont été identifiées et des solutions ont été trouvées pour être à la fois plus rigoureux et moins bureaucratique.
Je tiens aussi à parler des jeunes. La croissance de l’apprentissage continue, mais tout n’est pas parfait. Il y a dans certains secteurs encore trop de ruptures des contrats. Nous devons nous inspirer des meilleures pratiques pour en réduire le nombre.
Enfin dans les concertations à venir avec les partenaires sociaux, je souhaite notamment que nous puissions réfléchir à permettre l’accès de tous à cette modalité de formation. Le contrat de professionnalisation serait alors un formidable levier pour faciliter les transitions ou les reconversions professionnelles, et mieux former les actifs aux emplois d’avenir qui seront nécessités par les grandes mutations écologiques, numérique et démographique. Si nous parvenons à le rénover, il peut devenir une voie de formation intéressante pour les entreprises comme pour les actifs, qu’ils soient demandeurs d’emploi ou salariés. C’est ce que nous testons depuis le début du mois de juin dans le cadre d’une expérimentation dite de « VAE inversée », qui permet à une entreprise connaissant des difficultés de recrutement de former en situation de travail (AFEST) un salarié recruté via un contrat de professionnalisation rénové.
Mon souhait est de faire du CPF un véritable outil de réussite des transitions professionnelles, pour l’ensemble des actifs. L’introduction d’une participation financière de l’usager au coût de la formation n’a d’autre but que de permettre une meilleure orientation du catalogue des formations vers des besoins à finalité professionnelle.
Un décret, discuté avec les partenaires sociaux, acteurs et interlocuteurs incontournables dans le champ de la formation professionnelle, doit prévoir les modalités de cette participation financière.
Les discussions sur le reste à charge ont ensuite vocation à se tenir dans le cadre des travaux que nous aurons à conduire dans la perspective d’un projet de loi traitant des questions de formation.
Ce n’est pas du tout mon optique. La liberté de choisir son avenir professionnel profite de la simplicité d’usage du CPF. Ensuite, complémentairement, il y a beaucoup de sujets à traiter, comme le développement des abondements par les entreprises ou les branches, voire les collectivités territoriales. De même est-il intéressant de soutenir le développement du conseil en évolution professionnelle, qui peut devenir encore plus utile et pertinent qu’il ne l’est déjà aujourd’hui.
C’est le président de la République lui-même qui a confirmé le maintien des aides à l’alternance à haut niveau pour les prochaines années. Vous savez la détermination d’Emmanuel Macron à atteindre 1 million d’apprentis.
Les employeurs ont donc toutes les raisons de renforcer leur engagement dans l’accueil d’apprentis. Je souligne l’effort réalisé aux premiers niveaux de qualification, avec le relèvement des montants de 5000 à 6000 euros, parce que nous savons combien l’apprentissage est efficace pour l’accès à l’emploi dans les métiers concernés.
Nous engageons en ce moment une réforme de la VAE afin de permettre à chacun de mieux se saisir de cet outil de reconnaissance des compétences acquises, levier important pour accompagner les parcours de transitions et les reconversions professionnelles vers les métiers porteurs d’emplois. Nous avons souhaité simplifier et moderniser drastiquement les conditions d’accès à la VAE, qui bénéficie aujourd’hui à seulement 30 000 personnes chaque année.
Le nouveau service public de la formation tout au long de la vie doit donner une nouvelle impulsion à la VAE, dont le nombre de bénéficiaires est appelé à tripler d’ici 2027. C’est la fin du dossier administratif et le début d’une procédure numérique en quelques clics sur un site unique, pour reconnaître toutes les compétences, et cesser de cliver « formation initiale » et « formation continue ». La réforme doit également permettre d’économiser le temps de formation en concentrant les parcours de formation sur les seuls besoins complémentaires.
Le passeport de compétences ouvre progressivement. Vous pouvez d’ores et déjà le tester en ligne. Un peu plus de 15 millions de passeports sont déjà alimentés par des premières données, avec environ 30 millions de diplômes et de certificats qui ont déjà été collectés.
Il va permettre d’éditer des CV dont le contenu sera garanti par l’Etat, dès lors que les informations présentées seront non pas des simples déclarations par les personnes, mais qu’elles seront issues de bases administratives. A ces données « garanties », on pourra bien sûr ajouter des renseignements supplémentaires, dont des badges ouverts. On pense d’ailleurs commencer l’an prochain avec les bénévoles des jeux olympiques.
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