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Iris Duvignaud (Cofrac) : « Qualiopi unifie la certification qualité de la formation »

Iris Duvignaud est Responsable d’accréditation au Cofrac, au sein de la section Certifications, qui est en charge du secteur de la formation professionnelle. Elle répond à nos questions sur le déploiement de la nouvelle réglementation en matière de qualité de la formation issue de la réforme du 5 septembre 2018.

 

A partir du 1er janvier 2021 (1er janvier 2022 pour les CFA), tous les organismes de formation qui souhaitent que leurs clients puissent bénéficier de financements publics ou mutualisés devront détenir une certification qualité, intitulée Qualiopi. Celle-ci doit être délivrée par un organisme certificateur accrédité ou en cours d’accréditation par le Cofrac. 16 organismes ont déjà reçu cette accréditation. La liste est régulièrement actualisée sur le site du ministère du Travail.

 

>> En savoir plus sur la réforme de la qualité de la formation professionnelle

Management de la formation : quels sont les enjeux de la réforme de la qualité dans la formation professionnelle, du point de vue du Cofrac ?

Iris Duvignaud : le Cofrac – et notamment sa section Certifications, qui est en charge du domaine de la formation professionnelle – développe des schémas d’accréditation pour différents dispositifs réglementaires ou privés qui exigent l’accréditation, ou pour des demandes d’ordre volontaire émanant directement de la part d’organismes.

La particularité du dispositif demandé par la DGEFP était le volume de prestataires à certifier dans un court délai, et donc la nécessité d’accréditer un nombre conséquent d’organismes certificateurs (OC) dans le temps imparti. Ce volume a exigé des recrutements de collaborateurs en interne et surtout d’évaluateurs missionnés pour aller auditer les OC. Nous avons ainsi dû anticiper toutes nos actions afin de pouvoir ouvrir la possibilité de candidater aux organismes certificateurs le plus tôt possible et ne pas retarder les certifications, dont les dates butoirs sont prévues par la réglementation.

Nous recevons encore des dossiers de candidature d’OC et d’autres sont en cours d’instruction.

Nous avons aussi été amenés à communiquer davantage à l’extérieur et à participer à plusieurs évènements, le Cofrac n’étant pas un acteur très connu du grand public. En effet, plusieurs acteurs interviennent et les prestataires ne comprennent pas forcément le rôle de chacun (OPCO, France Compétences, DGEFP, Cofrac, etc.).

 

Comment va être aménagée la transition avec le système actuel ?

La reforme précédente, en vigueur jusqu’au 1er janvier 2021, reposait sur un double circuit : les financeurs pouvaient vérifier par eux-mêmes le respect par les organismes de formation des critères réglementaires de qualité (c’était le but de Datadock, mis en place par les OPCA) ; ou les organismes de formation pouvaient obtenir un label ou une certification reconnue par le Cnefop (Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles). Parmi ces labels, certains émanaient d’organismes qui bénéficiaient d’une accréditation du Cofrac – mais pas la majorité, ce n’était pas obligatoire. Cette accréditation attestait de leur capacité à délivrer une certification fiable à des organismes de formation, grâce à la vérification de leur compétence, respect du processus de certification et impartialité. Pour ces certificateurs, une partie du chemin est faite.

Tous les certificateurs, qu’ils soient accrédités ou non selon un référentiel reconnu par le CNEFOP, ont quand même dû déposer un nouveau dossier de candidature au Cofrac dans le but d’obtenir une recevabilité favorable pour démarrer les activités en vue de délivrer la nouvelle  certification Qualiopi. Ils devront tous être évalués tous les ans ou tous les 18 mois environ, comme pour le dispositif précédent. Les certificateurs qui maintiendront à la fois leur certification CNEFOP et Qualiopi seront évalués par le Cofrac pour les deux. En effet, Qualiopi étant obligatoire, certains prestataires pourraient vouloir se distinguer des autres grâce à une certification CNEFOP volontaire. D’autres voient un intérêt « qualité » dans certaines démarches de certification qu’ils ont en cours et qui abordent des aspects complémentaires à ceux de Qualiopi.

 

Et du point de vue des organismes de formation ?

Du point de vue de l’ensemble des prestataires, la transition est majeure car la plupart n’a jamais engagé de démarche qualité, le Datadock étant un processus purement déclaratif. Ils devront très rapidement prendre connaissance du référentiel de la DGEFP, se mettre en conformité et sélectionner l’organisme certificateur de leur choix pour demander un audit de certification au plus tôt. En effet, ils n’ont qu’un an pour être certifiés (2 ans pour les CFA).

Pour ceux qui étaient déjà certifiés par le biais d’un label reconnu par le CNEFOP, la transition se passera plus facilement : la mise en place de la nouvelle certification Qualiopi, exigera moins d’efforts de leur part. Très concrètement, les prestataires doivent analyser l’écart entre leur certification actuelle et le référentiel de la DGEFP et se mettre en conformité le cas échéant. Ils devront, comme les nouveaux certifiés, obtenir la nouvelle certification avant le 1er janvier 2021 (avant le 1er janvier 2022 pour les CFA). L’avantage pour les certifiés actuels, c’est qu’ils bénéficieront de durées d’audit aménagées, telles que prévues par l’arrêté du 6 juin 2019 relatif aux modalités d’audit associées au référentiel national mentionné à l’article D. 6316-1-1 du code du travail. Ensuite, tout le monde sera sur le même système.

 

La réforme implique-t-elle uniquement, pour les organismes de formation, un nouveau coût et de nouvelles démarches administratives, ou va-t-elle les contraindre à changer leur organisation ou leurs façons de faire ?

L’accréditation du Cofrac s’applique aux organismes certificateurs et non aux prestataires. Elle garantit l’impartialité, la compétence et le respect du processus de certification par l’organisme certificateur. Ce n’est donc pas l’accréditation qui garantira que la certification Qualiopi ira plus ou moins loin que les certifications CNEFOP. Ce que garantit l’accréditation en plus, c’est que tous les organismes certificateurs seront soumis aux mêmes règles (celles de la norme ISO/IEC 17065).  Ce dispositif assure ainsi l’uniformisation de la certification, avec les mêmes modalités d’audit, ce qui n’était pas possible avec la cinquantaine de certifications reconnues par le CNEFOP.

Pour ce qui est du coût, les certifications sont délivrées par des organismes privés et il n’existe pas d’instance de régulation de tarif. Les prestataires qui n’étaient que « datadockés » devront investir dans une démarche de certification : il y a donc un impact financier par rapport à la situation actuelle. Pour ceux qui étaient déjà certifiés, il s’agira soit d’un remplacement de leur certification par Qualiopi, ce qui ne devrait pas engendrer de coût supplémentaire (puisque les audits sont  récurrents), soit d’un maintien de deux certifications en parallèle, impliquant donc davantage de frais.

La certification Qualiopi ne révolutionne pas la façon de procéder du prestataire, et ce n’est pas son objectif. Elle reprend le métier – en l’occurrence le métier de la formation – tel qu’il doit être exercé pour garantir la qualité de la prestation, conformément à la réglementation. Souvent, les prestataires réalisent déjà ce qui est prévu dans le référentiel : la difficulté est d’être en mesure d’en assurer la traçabilité. Il ne devrait donc pas y avoir d’impact organisationnel fort sur les prestataires. La certification implique surtout une remise à niveau au regard de la réglementation, parfois méconnue, et vis-à-vis des besoins de traçabilité.

 

Quel effet peut-on attendre de cette réforme sur le fonctionnement du marché de la formation ?

Par retour d’expérience sur d’autres dispositifs réglementaires exigeant la certification d’organismes de formation sous accréditation, il est possible, voire probable, que des prestataires cessent leur activité. Le second impact, qui est recherché, c’est d’amener les prestataires à proposer des actions concourant au développement de compétences de qualité. Les offres de formation seront mieux encadrées et les bénéficiaires pourront profiter d’une meilleure visibilité des prestataires et de leur offre. Avec l’application « Mon compte formation » lancée par le ministère du travail le 21 novembre 2019, l’accès à la formation et le recours à un prestataire à terme certifié devient plus clair et plus simple. Enfin, le ministère du travail mettra prochainement sur son site Internet la liste des prestataires certifiés, ce qui pourra inciter les prestataires à se mettre à niveau.

Quant aux CFA, l’ouverture du marché engendrera de la concurrence ; dans ce contexte, la certification Qualiopi  leur permettra d’atteindre un niveau de qualité minimum, de quoi rassurer les donneurs d’ordre, les financeurs et les bénéficiaires.

Les bénéficiaires des actions de formation pourront également solliciter les organismes certificateurs voire, le cas échéant, le Cofrac en cas de problèmes rencontrés avec les prestataires sélectionnés. En effet, en cas d’un mécontentement vis-à-vis d’un OC, le bénéficiaire ou autre (OPCO, entreprise, etc.), pourra adresser une plainte formelle qui devra être traitée par l’OC. En l’absence de réponse satisfaisante – ou de réponse tout court – le plaignant pourra transmettre sa plainte au Cofrac, qui interviendra auprès de l’OC conformément aux exigences d’accréditation.

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