Ce sont deux sujets clés qui conditionnent la réussite de la réforme – sans doute au même titre que le déploiement du nouveau CPF – leurs nouvelles modalités restent largement à réinventer.
Si les modalités de mise en œuvre de la réforme qui attendaient des décisions urgentes sont en cours de stabilisation avec la publication des décrets sur le CPF, les nouvelles règles de financement et avec la définition des listes éligibles au CPF par les partenaires sociaux annoncée pour l’automne, le nouveau cadre de l’action de formation et les règles applicables en matière de qualité de l’offre restent à définir.
Définir ce qu’est une action de formation reste important. Cela est d’autant plus important que c’est également au travers de la définition de l’action que l’on pourra identifier les actions qui permettent à l’entreprise de considérer qu’elle s’est acquittée de ses obligations dans le cadre du nouvel entretien professionnel. En effet, tous les 6 ans, l’entreprise doit démontrer qu’elle a permis à chaque salarié de 2 des 3 mesures suivantes:
Il faut repenser le cadre sans pour autant faire table rase de tout ce que l’on a pratiqué jusqu’à aujourd’hui. L’ambition affichée par l’accord national interprofessionnel et par la loi est de consacrer plus d’effort et plus de temps à la gestion des compétences en libérant du temps et de l’énergie sur la gestion administrative. Cela suppose, au-delà des effets d’annonce et des discours sur l’importance de l’investissement dans la formation, de (re)penser ce qui relève de la formation dans l’entreprise et de prendre en compte toutes les formes de transmission des compétences. Il faut sortir d’une approche administrative qui visait à distinguer ce qui était « imputable » de ce qui ne l’était pas et de penser de façon globale la gestion des compétences dans l’entreprise.
Les deux décrets sur la définition de l’action de formation sur la qualité de la formation sont annoncés pour l’automne voire pour le courant de l’hiver 2014. Cela doit permettre de prendre le temps de la concertation pour traduire ces évolutions sans réinventer des approches administratives.
Je plaide pour un élargissement de la définition de l’action de formation. Certes, la loi a déjà, en partie, élargi la définition de l’action de formation en précisant que celle-ci peut désormais être séquentielle mais il faut aller au-delà. Dans l’entreprise, les modalités de la formation sont diverses : mises en situation, transmission (mentorat), tutorat… Si un cadre reste nécessaire, il doit être en cohérence avec les réalités de l’entreprise.
La question de qualité de la formation est elle aussi une question cruciale, oubliée des précédentes réformes. En réalité, les initiatives sont nombreuses en la matière et les organismes ont plusieurs façons de témoigner de leur préoccupation pour la qualité des formations qu’ils dispensent : normes et certification (Afnor, ISO 9001), homologations, habilitations, chartes ou labels, Qualifications (OPQF…) …
Mais notre système souffre justement d’un trop grand nombre de labels et cette dispersion des référentiels selon les commanditaires rend complexe le management de la qualité – faible lisibilité, difficile comparabilité – et impose aux OF de concilier des approches différentes et souvent contraignantes.
À compter du 1er janvier 2015, cette question importante de la qualité de l’offre de formation entre dans le Code du travail avec l’article L. 6316-1 : les OPCA et les OPACIF, l’État, les Régions, Pôle emploi et l’Agefiph devront s’assurer, lorsqu’ils financent une action de formation de la capacité du prestataire de formation mentionné à l’article L. 6351-1 à dispenser une formation de qualité. Un décret en Conseil d’État va en préciser les conditions.
Or, comment définir ce qu’est une formation de qualité ? Qui va s’en assurer ? Comment éviter la dispersion des labels sans, dans le même temps, imposer une approche administrative qui n’aurait pas de sens (apprécier la qualité renvoie nécessairement aux objectifs de la formation et doit être contextualisé) ? Faut-il renvoyer à chaque financeur la définition des critères pertinents ou définir des critères partagés par tous, tronc commun applicable dans toutes situations ?
Ces questions sont à la fois complexes et particulièrement importantes. Elles renvoient à des enjeux de gouvernance mais également à des enjeux méthodologiques. Je plaide plutôt pour la seconde approche de tronc commun à décliner ensuite selon les particularités mais je plaide aussi (surtout ?) pour que les approches ne soient pas uniquement normatives mais également méthodologiques. L’enjeu n’est pas d’établir une norme, un cadre intangible mais d’appuyer le développement des approches Qualité. Ne serait-il pas utile qu’un organisme, comme l’Institut National de Recherche Pédagogique (INRP) dans le domaine de l’Éducation nationale, propose un cadre méthodologique, collecte et mette en commun les bonnes pratiques, permette d’établir des synergies et de proposer des process pertinents pour le transfert de compétences ? L’enjeu est en effet, selon moi, de développer un outillage, de proposer des appuis méthodologiques, de partager des expériences et de soutenir, d’accompagner des expérimentations et des innovations pédagogiques.
Là encore, une réflexion associant tous les acteurs – financeurs mais également acteurs de terrain et experts – me parait nécessaire afin proposer une approche de la qualité qui soit pertinente et utile.
Vous retrouverez la suite de l’interview de Carine Seiler dans quelques jours. Nous aborderons la fin de la 2483, la suppression du 0,9% et son impact sur la fonction Formation, …
Crédits photo : © Philippe Grangeaud
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