
Certifier les certificateurs : la liste Cnefop est sortie
La première liste de labels répertoriés par le Cnefop est parue le 7 juin 2016. 10 normes couvrant 1500 organismes de formation sont retenues.
Très attendue, la première « liste » du Cnefop est enfin parue le 7 juin 2016. Elle contient dix noms de structures qui seront habilités à délivrer un label de qualité aux organismes de formation. Un label indispensable à partir de 2017 pour obtenir des financements des Opca ou d’autres acteurs publics. Conséquence de la réforme de mars 2014 et du décret « qualité » du 30 juin 2015, cette liste n’épuise cependant pas la question, et en pose de nouvelles.
Annoncée plusieurs fois, repoussée aussi souvent, la liste du Cnefop a donc été mise en ligne la semaine dernière. Bilan : sur 24 dossiers examinés, 10 sont retenus. 3 autres restent à étudier. Aux yeux de beaucoup d’acteurs, c’est déjà tard pour un déploiement du dispositif au 1er janvier 2017. Revenons rapidement sur les enjeux.
La qualité : un objectif de la réforme
La réforme de 2014 affichait l’ambition de modifier en profondeur le fonctionnement du système de formation professionnelle. En déliant les entreprises de l’obligation de dépense au titre du plan de formation, elle renforçait indirectement la logique de marché en matière d’achat de formation. Pour les entreprises, incitées à concevoir toujours davantage la formation comme un investissement, tout outil permettant d’améliorer la transparence du marché était donc bienvenu. L’autre enjeu d’une labellisation de la qualité était bien sûr de garantir la bonne utilisation des fonds publics et paritaires alloués au financement de la formation professionnelle.
La loi a donc fait le choix de confier le contrôle a priori de la qualité aux financeurs, qui comprennent 5 catégories de structures : les Opca, les Opacif, l’Etat, les régions, Pôle emploi. Ces acteurs ont reçu la mission d’évaluer « la capacité du prestataire de formation […] à dispenser une formation de qualité », en préalable à toute décision de financement.
A noter que les entreprises restent libres d’acheter de la formation à n’importe quel organisme, certifié ou non, dès lors qu’elles ne recourent pas à un financement public ou Opca. Il ne s’agit pas de délivrer des autorisations de former !
Une liste : pour quoi faire ?
Pour trier le bon grain de l’ivraie, les Opca et les autres financeurs disposent d’un référentiel de 6 critères. Pour l’appliquer, ils peuvent procéder de deux façons :
- En établissant leur propre démarche de certification qualité.
- En s’appuyant sur des labels délivrés par des organismes certificateurs.
Mais qui certifiera les certificateurs ? C’est le rôle du Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (Cnefop). Plus précisément, il certifie les certifications, en établissant une liste de celles « dont les exigences sont conformes aux critères » du décret qualité. C’est la raison pour laquelle tout l’écosystème formation attendait avec tant d’impatience la liste finalement parue mardi dernier, et qui contient les premiers noms de structures autorisées à labelliser « qualité » les organismes de formation.
On a donc bien une organisation en 3 étages : le Cnefop certifie des organismes certificateurs (ou plutôt leurs labels), qui à leur tour certifient les organismes de formation.
Pour simplifier le tout, l’agrément à certifier peut être généraliste ou ne porter que sur certains domaines de formation : un organisme peut recevoir la faculté de labelliser certaines formations et pas d’autres. De leur côté, les Opca peuvent très bien ajouter leurs propres exigences à un label donné. Et au final, les labels qualité ne sont théoriquement pas obligatoires pour obtenir un financement, puisqu’il reste possible en principe, pour un organisme de formation, de prouver à l’Opca qu’il satisfait les critères. Même si, en pratique, il est peu probable que ce cas de figure soit très répandu.
Pour pallier cette difficulté, les Opca, avec la Copanef et le FPSPP, travaillent sur l’élaboration d’outils communs pour évaluer rapidement les organismes non labellisés, de façon harmonisée. Les deux démarches (labellisation par le Cnefop et création d’outils communs aux financeurs) sont présentées comme complémentaires.
Et les gagnants sont…
Le Cnefop a reçu 27 dossiers. Sur les 24 qui ont été examinés, 10 ont été retenus : 5 généralistes et 5 spécialisés. Cela laisse donc encore 3 dossiers en attente de décision. Ces derniers (parmi lesquels ICPF & PSI) ont fait l’objet de demandes d’améliorations et « passeront l’oral » début juillet.
Parmi les 5 normes généralistes retenues, on compte :
- Le seul label régional en lice, celui du Languedoc Roussillon Midi Pyrénées.
- La certification de conformité en Formation professionnelle d’AFNOR Certification.
- La certification de qualification professionnelle de l’ISQ OPQF.
- La certification FAC « ‘facilitateur en acquisition de compétences » d’I.Cert.
- Le label Eduform du Ministère de l’éducation nationale.
Les 5 normes spécialisées sont :
- La certification de services Qualicert RE/VIV/03 – « Engagements certifiés pour la formation des entrepreneurs du vivant » délivrée par SGS ICS.
- La certification engagement de service REF221 – Services aux Agriculteurs et Acteurs des Territoires d’AFNOR Certification.
- Le label APP (Atelier de Pédagogie Personnalisée).
- Le label CIBC QUALITE TOTALE de la Fédération Nationale des CIBC.
- Le label Ecole de la deuxième chance.
Toutes ces normes sont inscrites sur la liste du Cnefop pour 3 ans. Sans conditions pour 8 d’entre elles, et sous réserve d’améliorations pour les 2 autres. La réglementation prévoit en outre une clause de « revoyure » annuelle. Le Cnefop a par ailleurs émis des recommandations à la plupart des certifications lauréates.
Parmi les 14 dossiers retoqués, on compte quelques « poids lourds » de la certification : la norme NF Formation d’Afnor, les normes Iso 9001 d’Afnor et de Bureau Veritas devront ainsi revoir leur copie. En cause, l’absence d’un « référentiel unique », critère requis par le Cnefop. Tout n’est pas perdu pour autant : les « recalés » pourront déposer à nouveau un dossier. Mais pour les organismes de formation qui comptaient sur ces labels, voire avaient investi dans leur acquisition, pour obtenir des financements à partir du 1er janvier 2017, c’est l’incertitude.
Le système de certification de la qualité prévu par la réforme de 2014 continue donc de se mettre en place. Le processus n’est pas simple, et la visibilité reste réduite pour beaucoup d’organismes de formation. Il reste que près de 1500 d’entre eux (dont 1000 bénéficiaires de l’ISQ OPQF) viennent de recevoir une forme d’assurance, pour 3 ans, de pouvoir bénéficier de financements Opca et publics, sans complications supplémentaires. Il est encore un peu tôt pour connaître l’effet de ces mesures sur le marché dans son ensemble. Nous resterons en veille !
Crédit illustration : Cnefop
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