De l’anniversaire de Centre Inffo (40 ans déjà !) au « décollage » attendu du CPF, en passant par l’actualité des organismes de formation, les implications du numérique pour la fonction Formation et les transformations managériales souhaitables ou en cours, le mois de mai n’a pas été chômé sur le front de la formation. L’essentiel des articles de la presse papier spécialisée, à l’attention de la communauté de la formation. Les sources sont les suivantes :
- Revue RH&M (n°61) pour les contributions de Cécile Dejoux et Patrick Margron ;
- Inffo Formation (n°899) sur l’actualité de la FFP, l’intervention de Paul Santelmann et la formation continue dans l’université ;
- Inffo Formation (n°900) sur les 40 ans de Centre Inffo ;
- Comprendre (enfin !) la formation professionnelle (FFP) ;
- Entreprises & Carrières (n°1286/1287) sur le e-learning chez Bouchara-Recordati ;
- Entreprises & Carrières (n°1288) sur la formation chez L’Oréal ;
- Entreprises & Carrières (n°1289) sur l’e-learning chez Meetic ;
- Entreprises & Carrières (n°1290) sur le CPF, le catalogue Afpa et l’entretien avec Jean-Denis Culié ;
- Education permanente (n°207), dossier sur l’apprenance.
Les 40 ans de Centre Inffo
Inffo Formation consacre son numéro 900 (2e quinzaine de mai 2016) aux 40 ans de Centre Inffo, créé par décret en mars 1976. Sous tutelle de la DGEFP, l’organisme « est un moment d’accalmie entre deux moments de dispute : en amont, au moment de fixer les règles et en aval lorsqu’il s’agit de les interpréter », selon Marcel Caballero (p.16), administrateur honoraire de la structure. « Positionné au cœur du quadripartisme » Etat, région, employeurs, salariés, selon son directeur général Julien Nizri, Centre Inffo éclaire la préparation et la mise en œuvre des réformes par son expertise, sans pour autant prendre parti. L’organisme s’attache enfin à rendre compréhensible au grand public le système de la formation professionnelle, à la complexité croissante.
Ce dossier rétrospectif est notamment l’occasion de retracer la trajectoire de Jean-Marie Luttringer (p.42), premier directeur du service juridique de Centre Inffo, puis directeur de l’emploi et de la formation à la Caisse des dépôts (1984-92) et enseignant à Paris X – une référence du commentaire juridique de la formation. « L’intérêt de Centre Inffo », résume-t-il, « est de mettre de l’huile dans les rouages d’une approche systémique de la formation ».
L’actualité des organismes de formation
Du côté des organismes de formation privés, Inffo Formation n°899 (1re quinzaine de mai, p.24) nous apprend la réélection de Jean Wemaëre (Demos) à la présidence de la Fédération de la formation professionnelle (FFP). Le bureau est rejoint par Nadine Gagnier (Man’agir) et Loïc Charbonnier, président délégué général d’Aftral, le pôle de formation du transport et de la logistique. Lien entre formation professionnelle et performance économique, suivi du CPF (compte personnel de formation), innovation et digitalisation seront au programme de ce nouveau mandat.
Le mois de mai a été aussi marqué, pour la FFP, par la publication en ligne d’un document pédagogique très attendu : Comprendre (enfin !) la formation professionnelle. On y trouve, en 36 pages de présentation, une mine de chiffres-clés permettant de resituer l’enjeu de la formation professionnelle, le marché qu’elle représente, la dépense et l’organisation de la gouvernance.
Pour ce qui est des opérateurs publics, Inffo Formation n°899 donne la parole à Paul Santelmann (p.28), directeur de la veille « emploi et qualifications » à l’Afpa, au sujet de la réforme et du système de formation professionnelle.
- Il pointe « le décalage persistant entre le monde institutionnel de la formation et les pratiques», et regrette le fait que sur « les quelques 10 millions d’ouvriers et d’employés […], il n’y en a que 3 à 400 000 qui se posent la question de l’évolution professionnelle dans le cadre d’un projet de formation ».
- Il estime qu’il faudrait «sortir du surinvestissement institutionnel des pouvoirs publics » dans la formation professionnelle, l’Etat devant avant tout garantir « la qualité de l’appareil de formation », mais sans imposer des normes prescriptives qui standardisent l’offre. Les pouvoirs publics n’ont pas de raison, selon lui, d’intervenir sur les formations courtes d’adaptation, qui ont lieu de toute façon ; en revanche, ils sont légitimes pour ce qui est d’accompagner les reconversions professionnelles.
- Pour l’avenir de sa propre institution, il voit « une Afpa centrée sur des créneaux technico-professionnels liés aux transformations des métiers et des secteurs en mutation».
Le même numéro (p. 12) consacre une double page à la formation continue universitaire, à laquelle le rapport Germinet a assigné l’objectif de passer de 400 millions à un milliard d’euros de chiffre d’affaires d’ici 2020.
A ce sujet, Entreprise & Carrière n°1290 (24 au 30 mai 2016) signale (p.27) le lancement du nouveau catalogue de l’AFPA, qui comporte « une offre de formations métiers plus étoffée sur, notamment, les métiers de l’aéronautique, du bâtiment et de la fibre obtique ». Reste que sur plus de 850 formations, dont 40 nouvelles et 235 qualifiantes en alternance, on compte encore 330 formations courtes. On recense également 28 formations au CléA (socle de compétences) et 115 formations certifiantes, sanctionnées par un CCP et éligibles au CPF. L’organisme forme 60 000 salariés par an, sur 140 000 personnes au total.
Des nouvelles du CPF
Ce même numéro nous rend compte (p.12) des chiffres du baromètre Cegos relatifs au CPF (Compte personnel de formation). Selon l’étude, réalisée auprès de 440 salariés en France (ayant suivi une formation dans les 3 années précédentes), la montée en charge du dispositif se poursuit :
- 4 sur 5 en connaissent l’existence du CPF.
- Deux fois plus de salariés informés ont créé leur CPF que l’année dernière à la même date.
- Deux fois plus de salariés interrogés ont repéré une formation qui les intéresse, éligible au CPF (38% contre 19%) ; et 41% d’entre ceux-ci ont déjà déposé leur demande de financement.
L’étude donne également la parole aux DRH (120 personnes interrogées).
- 60% d’entre eux ont déjà accepté des CPF sur le temps de travail pour leurs collaborateurs.
- 43% disent compléter systématiquement le financement du CPF, 43% le font dans certains cas.
Enfin, les salariés apparaissent plus confiants dans la capacité du CPF à maintenir leur employabilité et développer leurs compétences que les DRH.
L’e-learning en pratique
Meetic, pionnier du Web, s’est converti récemment à l’e-learning. Entreprise et Carrières n°1289 (17-23 mai 2016, p.29) consacre une page aux solutions E-Doceo mise en place par le site de rencontres au profit de ses collaborateurs et des salariés des prestataires externes du service clients. Soit 200 apprenants en tout à ce jour, pour lesquels ont été créés une vingtaine de parcours. Les thèmes couverts vont de la présentation de la société et des produits à la maîtrise des outils du back-office et du service clients. La possibilité de former à distance a compté dans ce choix, les équipes étant réparties sur 15 pays d’Europe. L’adoption du e-learning, en l’occurrence, aura joué le rôle d’un accélérateur de changement, en donnant naissance à « un véritable pôle dédié à la formation et à la montée en compétences des collaborateurs internes et externes » (Elisabeth Périot, responsable formation au service client de Meetic).
La « dispersion géographique » des collaborateurs à former figure également parmi les raisons qui ont poussé la filiale française du laboratoire pharmaceutique Bouchara-Recordati à adopter le e-learning pour la formation de ses visiteurs médicaux et attachés pharmaceutiques. Le n° 1286-1287 d’Entreprises & Carrières (26 avril au 9 mai 2016, p. 28) nous apprend également que le laboratoire a recours au LMS 360Learning, pour diffuser les quelque cent modules « consacrés à l’actualisation des connaissances sur les pathologies ». Pour Bouchara-Recordati, l’enjeu de la formation est aussi réglementaire ; l’évaluation et la traçabilité des résultats pour chaque collaborateur sont donc essentielles, et les solutions adoptées intègrent ces nécessités. S’y ajoute une vaste base de connaissance spécialisée actualisé en permanence, à la disposition des salariés. Résultat : une plate-forme de e-learning qui « ne représente que 2,83% de l’effort global de formation » d’une entreprise qui ne consacre que 1% de sa masse salariale à cette fonction.
Numérique et fonction formation
Cécile Dejoux, professeur au Cnam et à l’ESCP Europe et directrice du Learning Lab « Human Change », énumère trois « défis pour la fonction Formation à l’ère du numérique », dans les colonnes de la Revue RH&M d’avril 2016 (n°61, p.22).
- «Passer d’une logique de contenus à une logique de mise en relation » des collaborateurs avec les différents types de ressources pédagogiques (internes, externes), pour répondre à leurs besoins individualisés.
- « Prendre en compte les nouveaux modes d’apprentissage »: la « valeur ajoutée » de la fonction Formation sera fonction de « sa capacité à repérer, évaluer, sélectionner » les ressources pertinentes et à « imaginer des combinaisons ludiques, différenciées et nomades ».
- « Valoriser le ‘crowd employee’ », en intégrant les propositions des collaborateurs et en tenant compte de leur notation des solutions, dans une approche bottom up.
Des recettes qui semblent assimilées par un grand acteur comme L’Oréal, si l’on en croit l’article consacré au groupe dans Entreprises & Carrières n°1288 (10 au 16 mai 2016, p. 23). On y découvre en entreprise qui utilise la formation (et le recrutement) comme « levier de la transformation digitale » :
- Dans la filière digitale du groupe, certains salariés consacrent « 20 à 30% de leur temps à la transmission de compétences », notamment sous forme de reverse mentoring à l’intention du top 250.
- Des seniors participent à un « business game » dans lequel ils deviennent pendant deux jours patrons d’un site de vente de vins en ligne virtuel.
- 5500 salariés en 2015 et 8000 cette année ont été ou vont être formés à l’impact du digital sur leur métier.
Le numéro 900 d’Inffo Formation, déjà mentionné, signale d’ailleurs la sortie d’un rapport public (IGAS/Education nationale) consacré au thème « les besoins et l’offre de formation aux métiers du numérique ». Ce travail recommande notamment d’utiliser les données de la liste nationale des formations éligibles au CPF pour « recenser les besoins en compétences dans le numérique ». Il remarque que les entreprises du secteur ont besoin de « soft skills », mais aussi de spécialistes de la gestion des données et de postes d’encadrement.
RH et gestion des carrières
Entreprises & Carrière n°1290 donne la parole (p.38) à Jean-Denis Culié, professeur de GRH à l’école de management de Normandie. Pour lui, l’évolution vers le DRH « business partner », qui devait lui permettre d’aligner la RH sur la stratégie de l’entreprise, a surtout eu pour effet de donner « une place dominante aux préoccupations de court terme ». Le partage de la fonction RH avec le manager se fait au détriment d’une vision globale de la gestion des carrières, à l’échelle de l’entreprise. Face à cette évolution, le salarié « acteur de sa propre carrière » développe des stratégies de retrait ou au contraire de projet personnel qui l’amène à quitter l’organisation. Pour y remédier « les DRH doivent s’efforcer de fédérer les salariés autour du projet de l’entreprise », et convaincre les managers « de privilégier l’intérêt de l’entreprise plutôt que celui de l’unité dont ils ont la responsabilité ».
Autre son de cloche dans Inffo Formation n°900 (p. 10) : on y apprend que l’Institut européen du salariat, un réseau de chercheurs en sciences sociales a adressé à France Stratégie une note plaidant pour un « droit personnel à la carrière ». Il s’agirait d’un dispositif financé par une cotisation interprofessionnelle nationale, que les salariés pourraient mobiliser pour financer leur « accompagnement, le conseil de gestion de carrière », « notamment sur des questions de formation ».
Les compétences des nouveaux managers
RH&M n°61 publie une contribution de Patrick Margron (p.24), le DRH du Groupe Veolia Environnement, appelant à « ne pas ubériser nos managers ». Il propose, pour y parvenir, la méthode T2STM, qui passe, pour les managers, par « donner du temps, du sens et de la sincérité, dans cet ordre ». Le management ne doit pas se laisser transformer en plate-forme digitale : « la place du manager dans la transformation digitale, c’est d’être le moteur de l’intelligence collective et l’élément humain qui permettra à chaque équipier de déployer son autonomie dans le projet de l’entreprise et d’y trouver ce qui fait sens pour lui ». Pour ces nouveaux managers, les compétences (hors technique) à acquérir sont au nombre de 5, au moins : « la curation, l’interdisciplinarité, la créativité, l’intelligence émotionnelle, l’éthique ».
L’apprenance aujourd’hui
La revue Education Permanente consacre un dossier à la notion d’apprenance, née à la toute fin du siècle dernier pour appréhender le nouveau contexte de la transmission des connaissances à l’heure de la globalisation et de la digitalisation. On y trouve plus de 20 signatures, dont Olivier Charbonnier (Interface), Philippe Carré (Paris X), Bernard Alix (CNFPT), Sandra Enlart (Entreprise et Personnel, Dsides), Thierry Raynard (SNCF), Denis Cristol (CNFPT), Maxime Jore (Novancia)… La thématique est couverte de façon pluridisciplinaire, en replaçant l’individu en situation dans l’organisation.
Illustration : Monica Arellano-Ongpin / Flickr (recadrée)
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